Styrkaar, le Jerg des Sortsvinaers

De La Bibliothèque Impériale
Et quand les Quatre ne formeront plus qu’un, il chevauchera de par le monde, (…)
Auréolé de gloire, le fils d’un puissant roi sera adulé et vénéré. (…)
La Prophétie du Destin. Extrait du Livre Céleste des Divinations, par Nécrodomo le Dément
Styrkaar, le Jerg des Sortsvinaers, Champion de Slaanesh et Élu d’Archaon
Styrkaar est l’un des Quatre Élus d’Archaon lors de la Tempête du Chaos, comme l’avait prophétisé, des siècles avant sa naissance, le mystique, Nécrodomo le Dément.

Sktyrkaar naquit un jour sur la côte septentrionale de Norsca, territoire de la tribu des Sortsvinaers. Le Jerg Svengor, son père, en était le chef, et durant toute sa jeunesse Styrkaar fut traité avec la déférence due à son statut. Néanmoins, nul guerrier du nord quel que fut son rang n’aurait accepté un fils faible ou oisif, et Styrkaar dut apprendre à chasser et à se battre comme n’importe quel autre membre du clan. Le Jerg Svengor était imprévisible et d’humeur changeante, aussi on fils connut-il souvent le contact de ses poings, mais si un guerrier osait porter la main sur son rejeton, il le faisait fouetter jusqu’à ce que son dos ne portât plus la moindre parcelle de peau, puis il battait son fils si celui-ci méritait d’être puni. Il tenait en tout cas à ce que tous sachent que ce droit était sien.

Dès le berceau, Styrkaar eut conscience d’une présence que le reste de la tribu ne soupçonnait et riait de voir flotter au dessus de lui un ami à la forme éthérée. Celui-ci lui dit plus tard s’appeler Sle’zuzu et demanda à Styrkaar de ne jamais parler de lui a quiconque, sans quoi il serait obligé de s’en aller. Le jeune enfant accepta sans se poser de questions et ne trouva jamais étrange la présence de cet éternel compagnon. Sle’zuzu murmurait ses secrets au jeune fils du chef de tribu pour lui rendre la vie plus facile au sein du groupe, et si Styrkaar était pris en train d’accomplir un mauvais tour, il lui suffisait de répéter tout haut les mots que son ami lui soufflait à l’oreille pour que sa punition soit souvent amoindrie. Sle’zuzu paraissait avoir l’art de trouver à coup sûr les mots justes qui apaisaient les gens et les rendaient amicaux.

Styrkaar devint un garçon populaire, ouvert aux autres, capable de se faire des amis sans le moindre effort et de charmer les adultes impressionnés par son attitude téméraire et sa confiance en lui. L’absence totale de favoritisme dans les manières de son père lui valut le respect de ses semblables. Aux côtes des autres enfants de son âge lui furent transmises les techniques héréditaires des nordiques, afin qu’ils sachent se battre, chasser et faire voguer de longs vaisseaux sur les mers gelées. Styrkaar excella dans tous ces domaines, pour la plus grande fierté de son père et des anciens. Conseillé par Sle’zuzu, il se rendit rapidement compte qu’il pouvait tourner cette popularité innée à son avantage.

Arrive à l’âge de dix-huit ans, Styrkaar s’était arrogé une position d’importance dans la hiérarchie de sa tribu qui le tenait en haute estime. Son corps était devenu celui d’un guerrier grand et fort, ses nombreux raids menés contre les autres peuplades nordiques, les Kurgans du nord ou les cités côtières de l’Empire et de Bretonnie avaient tous été couronnés de succès. Ses pairs, et même les plus âgés des vétérans des Sortsvinaers, obéissaient aveuglément à ses ordres tant était grande la foi qu’ils plaçaient dans le fils de leur Jerg, dont la fierté que celui-ci éprouvait se mua lentement en méfiance, inquiet qu’il était de voir la popularité de Styrkaar et la loyauté des hommes envers lui devenir une menace. Sa façon de traiter son fils se fit de plus en plus injuste, ce pour quoi la tribu commença à lui en vouloir. Styrkaar attisait calmement les braises de la révolte qui couvait, en prenant tout les peines du monde à ne jamais paraître déloyal.

Un affrontement entre père et le fils, finit par éclater un soir que la tribu célébrait le succès d’une nouvelle expédition de Styrkaar. Le Jerg Svengor, le visage rougi par l’hydromel, refusa de se joindre aux félicitations adressées à son fils et quitta d’un pas titubant la table de banquet. Pointant le doigt vers son fils, il lui lança que jamais il ne parviendrait aux réussites que lui-même avait connues. Tandis qu’un murmure sourd et désapprobateur parcourait l’assemblée, Sle’zuzu, qui ne s’adressait plus que rarement à Styrkiar, poussa le jeune homme à agir. Celui-ci se dressa à son tour et reprenant les mots de Sle’zuzu, s’approcha calmement de son père pour lui demander de lever son verre avec lui. Outragé, le Jerg Svengor lança maladroitement son poing qui parvint tout de même à jeter son fils à terre. Un sourire fugace passa l’espace d’un court instant sur les lèvres de Styrkaar. Il se releva et essuya la goutte de sang qui perlait à son nez.

Les membres de la tribu avaient tous quitté leurs bancs pour entourer le Jerg et son fils. Le silence uniquement perturbé par le crépitement du feu fut alors rompu par une voix qui cria du fond du hall à Styrkaar de se défendre. Celui-ci afficha un nouveau sourire en reconnaissant la voix de Sle’zuzu. D’autres voix s’élevèrent jusqu’à ce que toute l’assistance n’eût qu’un désir, celui de voir Styrkaar riposter.

Furieux mais affolé, le Jerg Svengor se tournait en tous sens, cherchant en vain un regard approbateur qu’il ne trouva pas. Puis il frappa à nouveau du poing, que son fils évita en écartant la tête. Se rapprochant d’un bond, Styrkaar écrasa son coude contre le visage du Jerg Svengor, puis il envoya son pied dans le genou gauche du vieil homme, qui s’effondra à terre dans un craquement écurant. Alors que Styrkaar se penchait pour parachever son ouvrage, son père le saisit par sa tunique de cuir pour le tirer brutalement vers lui et lui brisa le nez d’un coup de tête. Styrkaar se dégagea de l’étreinte et frappa des deux poings sur les tempes de son père. Jerg Svengor s’écroula en arrière du sang s’écoulant de ses oreilles devenues sourdes.

Cette nuit-là, Styrkaar devint le nouveau Jerg de sa tribu natale. Les célébrations continuèrent de battre leur plein trois jours et trois nuits durant, et lorsqu’elles cessèrent enfin, Styrkaar était vautré sur les fourrures de sa paillasse, épuisé mais euphorique et entouré de femmes, quand Sle’zuzu vint lui parler de sa voix douce. L’ombre lui suggéra d’élever un autel à la gloire de Slaanesh, le Prince Noir que les Sortsvinaers appelaient Shornaal, qui selon ses dires l’observait depuis longtemps et lui réservait ses faveurs. L’esprit embrumé par des rêves de grandeur et d’excès, Styrkaar se laissa glisser dans le sommeil.

Dans les années qui suivirent, il conduisit les Sortsvinaers vers des batailles toujours plus nombreuses et des pillages toujours plus ambitieux afin de se délecter de la débauche de la guerre, en revenant toujours victorieux pour exprimer sa dévotion à son dieu. Après une de ces expéditions, Slaanesh se montra satisfait des actions de ce fidèle. Sous un lourd ciel de tempête, l’esprit de Sle’zuzu fusionna avec l’esprit de Styrkaar et s’engouffra dans son corps convulsé, dont la chair se mit à luire comme si des lueurs froides couraient sous sa peau pâle et dont les dents s’allongèrent en crocs délicats. Ceux qui le suivaient, ignorant tout de Sle’zuzu, n’y virent qu’une preuve que leur chef avait été touché par la grâce des dieux et tombèrent à genoux.

Au fil des ans, sa renommée continua de se répandre toujours plus loin sur les terres du nord et l’empreinte de Slaanesh se manifesta davantage. Styrkaar partait désormais au combat sur le dos d’une des créatures démoniaques et serpentines affectionnées par le Prince du Chaos. Des guerriers venus de tout la Norsca se pressaient sous sa bannière pour combattre au nom de ce favori des dieux, en espérant s’attirer ainsi une part de la grandeur de Styrkaar, lequel se délectait de toutes ces louanges et de toute cette dévotion dont il était l’objet.

Au combat, une beauté fluide l’animait et emplissait ses ennemis d’une horreur mêlée d’émerveillement. Monté sur sa bête au corps bestial mais gracile, il se glorifiait dans le massacre des rangs ennemis, donnant la mort au moindre mouvement de sa lame. Ses suivants déchaînés lui hurlaient leurs encouragements, plongés dans une transe ravageuse par l’effusion de sang, se disputant pour s’approcher de cet être exalté, mais si certains d’entre eux venaient trop près, Styrkaar frappait et ils reculaient, fous de joie que leur chair ait été lacérée par leur idole. Recherchant la bataille partout où il pensait pouvoir la trouver, leur maître prenait autant de plaisir à infliger la douleur à d’autres des façons les plus cuisantes qu’à souiller ensuite leurs dépouilles.

La série de carnages se poursuivit sans interruption pendant des années. Styrkaar et les siens massacrèrent bon nombre d’autres bandes parcourant les Désolations du Chaos, dont celle des adorateurs de Khorne de Garkan et les guerriers masqués de Tzeentch menés par le mystérieux Asgeiir. Il vainquit en combat singulier Vandred le Majestueux, un des autres favoris de Slaanesh, dont la bande fut émerveillée et se joignit à la sienne dès la mort de son champion.

Au milieu de son sommeil agité, des voix chuchotantes commencèrent à venir parler à Styrkaar d’un guerrier béni par tous les dieux et porteur des objets sacrés de jadis. Le nom d’Archaon surgit une nuit dans son esprit et le fit se lever de son lit encombré de corps lascif, l’esprit obnubilé et rendu dans un premier temps furieux par la magnificence qu’il percevait chez cet être. Slaanesh lui avait laissé savoir que lui aussi avait accordé sa confiance à Archaon, à l’instar de tout le panthéon des dieux, et que Styrkaar n’avait aucune chance contre lui. Incité par les voix qui murmuraient dans sa tête, il se mit à échafauder un plan.

Les récits des succès d’Archaon coururent bientôt comme une traînée de poudre et la nouvelle qu’il pénétrait sur le territoire contrôle par les Sortsvinaers fit naître chez eux la peur et l’excitation. Ils savaient que leur seigneur Styrkaar avait terrassé son rival Vandred, et que celui-ci avait été un des compagnons d’Archaon. Beaucoup pensèrent que la guerre était la raison de sa venue, pourtant Styrkaar ne quitta pas son trône, pas même quand il apprit que les Épées du Chaos approchaient.

La bande traversa les villages des Sortsvinaers sans rencontrer d’opposition et atteignit le fort central. Ce ne fut que lorsqu’Archaon se pencha pour passer la porte de la pièce où se trouvait Styrkaar, sa présence seule emplissant l’air d’une énergie électrique, que le Sortsvinaer se redressa de sa pose alanguie. Archaon hocha respectueusement la tête devant Styrkaar, qui lui retourna son salut et congédia de la pièce ses serviteurs ébahis.

Lorsque les deux hommes réapparurent à la porte, ils constatèrent que les habitants des terres des Sortsvinaers étaient venus nombreux pour connaître l’issue de la rencontre. Comme il était de coutume entre alliés, les seigneurs de guerre s’étreignirent mutuellement les avant-bras sous les vivats de la foule. Quelle armée au monde pouvait désormais tenir tête a celles de ces deux demi-dieux ? Archaon quitta ces terres confiant, ayant acquis la certitude que quand viendrait le temps d’une incursion dans les contrées du sud, Styrkaar mènerait un assaut de sa tribu depuis un point de départ différent, et que tous les navires à sa disposition feraient voile pour aller frapper l’Empire derrière sa faible ligne de défense.

Styrkaar attend ce jour avec impatience, car il sait que Slaanesh est satisfait de sa conduite et que s’il remplit le rôle qu’on attend de lui, sa renaissance à l’état de démon serait assurée.

Médias externes

Source

  • White Dwarf 101 - Septembre 2002