Le Sang de Sigmar

De La Bibliothèque Impériale
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Lumière Mourante

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Vers la fin de l’année 2522, des rumeurs troublantes se propageaient en Sylvanie. Même les hameaux les plus reculés avaient leurs propres histoires : on avait trouvé du bétail mutilé, des bébés avaient disparu de leurs petits lits et des meutes d’hommes morts erraient sur la lande. Les symboles sacrés ornant les temples avaient été arrachés et les seules traces laissées par les voleurs étaient quelques empreintes de souille sur les dalles. Les paysans du cru accrochaient des talismans sur leur porte et priaient Sigmar et Morr, craignant que le pire reste à venir. Mais même le plus ardent des prédicateurs ne pouvait soupçonner les ténèbres qui guettaient la Sylvanie.

L’Ombre de la Non-Vie

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L’Ombre de la Non-Vie s’étend de nouveau...
Les hommes et les femmes du Stirland sont très superstitieux, et à raison, car leur terre est vraiment maudite. Bien que les Guerres Vampiriques soient un lointain souvenir, la perversité des anciens maîtres de la province, les von Carstein, persiste.

Les habitants des provinces orientales de l’Empire savent reconnaître les signes du mal. Du cœur du Stirland au pied des Montagnes du Bord du Monde, la Magie Noire s’infiltre dans les sols et forme des mares invisibles. À moins d’invoquer Mórr, le dieu de la mort, et d’observer les bons rituels, ces énergies maléfiques réveilleront les morts où qu’ils soient enterrés.

Les Légions du Dessous

Les gens du Stirland ont pour coutume d’inhumer leurs proches après leur avoir fourré le gosier d’ail, de pattes de corbeau et de brins d’aubépine et de verveine. On coince des pièces de cuivre dans leurs orbites en offrande à Mòrr et on les enterre sur le ventre dans des tombes très profondes. En protégeant les morts de la sorte, on empêche les nécromants qui infestent le Vieux Monde de récolter leur sinistre moisson.

Malgré ces précautions, on croise plus souvent des morts qui marchent que des patrouilleurs ou des agents d’Altdorf au cœur de la Sylvanie. Les seigneurs vampiriques qui rôdent dans les châteaux en ruines ont eu des millénaires pour parfaire leur art et l’éternité enseigne la patience par-dessus tout.

À dire vrai, en Sylvanie, relever les morts est une affaire assez simple. Le sous-sol lui-même est saturé de Magie Noire, et pour chaque dépouille correctement sanctifiée, dix se mettent à tressaillir dans des tombes anonymes. Un simple couplet peut faire remuer et gémir la terre. Lorsque la lune Morrslieb est basse, des armées de cadavres défraîchis se fraient spontanément un chemin jusqu’à la surface et s’extirpent du sol. Leurs maîtres - les rejetons sanguinaires des premiers Vampires - les regroupent en ramassis compacts de viande morte, puis leur commandent de s’en prendre aux vivants.

Les Ténèbres Insondables

L’an 2522 touchait à sa fin, lorsqu’un épais manteau d’ombre tomba sur la Sylvanie, à tel point que même le soleil de midi était à peine perceptible dans l’obscurité ambiante. Chose encore plus étrange, cette manifestation de noirceur semblait s’arrêter aux frontières de la Sylvanie : il suffisait d’un pas pour faire passer le voyageur du soleil resplendissant aux ténèbres oppressantes. En Sylvanie même, les rayons de l’astre solaire ne perçaient plus. Le jour ne se démarquait plus de la nuit que par une faible luminescence laiteuse. Le phénomène était d’origine magique, cela ne faisait aucun doute. Les habitants de la province soupçonnaient, avec la certitude de l’expérience, que les seigneurs de la non-vie en étaient les responsables. Les Comtes Vampires sont des êtres mythiques et la légende veut que les ténèbres les suivent où qu’ils aillent. Néanmoins, voler la lumière du soleil à toute une province et la condamner à une mort lente, par l’inanition et la maladie, était une prouesse inouïe. La luminosité diminuait avec chaque jour qui passait et avec elle les espoirs de la Sylvanie.

Des citoyens superstitieux de l’Empire murmuraient que la puissance qui générait ces ténèbres n’était nulle autre que Mannfred von Carstein, le plus retors et le plus versé dans la magie de tous les Vampires. Nombre de ceux qui avançaient cette idée se faisaient traiter d’oiseaux de mauvais augure. Le folklore enseignait que Mannfred avait péri des siècles auparavant à Hel Fenn, de la main du Comte Électeur du Stirland, et que la dynastie von Carstein s’était éteinte avec lui. Mais le spectre des Comtes Vampires avait continué de planer et tous ceux qui évoquaient le retour de Mannfred n’étaient pas impartiaux.

Serments et Défi

La chasse au Vampire est ouverte ! Au nom de Sigmar !
Deux ans plus tôt, le Grand Théogoniste Volkmar avait missionné l’un de ses meilleurs hommes, l’ingénieux Répurgateur Gunther Stahlberg, pour éclaircir les rumeurs de réapparition de Mannfred von Carstein à Château Drakenhof. L’agent de Volkmar s’était rendu en Sylvanie en toute hâte. Et on n’avait plus entendu parler de lui. Volkmar aurait souhaité enquêter sur cette disparition en déployant les grands moyens, mais la guerre au nord faisait rage et Karl Franz craignait de diviser ses forces sur la base des ouï-dire.

La réserve de l’Empereur fut brusquement dissipée lors du Conclave Étatique - la réunion annuelle des plus fins esprits politiques de l’Empire. Les Comtes Électeurs rassemblés au palais Impérial avaient débattu de leurs petites querelles frontalières jusque tard dans la nuit, en annotant une vaste carte de la nation étendue devant eux. Le vélin était couvert de l’encre rouge des amendements suggérés. Volkmar était sur le point de perdre patience lorsque la lumière de la lune fut occultée par une ombre irrégulière voletant au-dessus de la carte.

Soudain, le toit de verre teinté du Grand Atrium se brisa et des éclats acérés s’abîmèrent en empalant des servants et en manquant de décapiter plusieurs électeurs. Un cadavre exsangue vint s’écraser sur la zone de la carte qui représentait la Sylvanie. Volkmar recula en reconnaissant le corps. C’était celui de Stahlberg. Dans la bouche du Répurgateur était enfoncé un parchemin portant le sceau en forme d’aile de chauve-souris des von Carstein. Tandis que les Comtes Électeurs cherchaient leurs armes à tâtons, Volkmar s’en saisit et brisa le sceau. Cette déclaration, écrite dans un style calligraphique élégant mais suranné, était la proclamation de sécession de la Sylvanie, signée de Mannfred von Carstein. Alors que Karl Franz calmait les esprits, Volkmar lisait la lettre à voix haute. Elle détaillait la prise de la province par le comte, qui invoquait l’héritage de Vlad von Carstein, et soulignait sa légitime revendication du trône impérial. Sous le vernis du protocole, le mépris transpirait de chaque phrase ; et la missive se terminait ainsi : « Comment les dirigeants de l’Empire pourraient-ils protéger ses frontières alors qu’ils ne voient pas ce qui se passe sous leur nez ? »

Un terrible pressentiment s’empara de Volkmar. Il ordonna à ses Archilecteurs de prendre la tête d’un détachement de la Reiksguard pour fouiller les cryptes du Temple. Ils trouvèrent des salles saccagées et des vétérans de la garde mis en pièces par des assaillants d’une force incroyable. De puissants artefacts étaient éparpillés sur le sol comme de vulgaires débris. Le seul objet qui manquait à l’appel était la légendaire Couronne de Sorcellerie, qui ornait autrefois le front du Grand Nécromancien, Nagash. Non seulement Mannfred avait maudit la Sylvanie, mais en plus ses agents avaient volé l’un des plus précieux objets conservés dans les cryptes du Temple, alors même que les électeurs déblatéraient dans les étages supérieurs. Volkmar était fou de rage. Avec une voix qu’on aurait pu prêter à Sigmar lui-même, il jura de tuer Mannfred von Carstein et de récupérer la Couronne.

Il restait au moins un agent actif en Sylvanie, le dénommé Alberich von Korden. Celui-ci soutenait depuis longtemps que Mannfred constituait toujours une menace. On le rappela sur-le-champ à Altdorf. La chasse était ouverte.

Les Chasseurs Chassés

Alors que les Ténèbres Insondables mettaient la province à genoux, les chasseurs de sorcières de Sylvanie étaient traqués à leur tour. Des meutes de bêtes voraces pourchassaient les Répurgateurs de jour comme de nuit, châtiant la moindre erreur d’inattention. Des troglodytes pâles rôdaient à la périphérie de la vision de leur gibier et emplissaient la nuit de leurs paroles ineptes en attendant qu’il baisse sa garde.

Les Répurgateurs étaient des hommes forts, mais des hommes seulement. L’épuisement eut raison de leur cran, l’un après l’autre. Même en changeant régulièrement d’auberge, les tenanciers finissaient toujours par retrouver leurs restes à moitié dévorés au petit matin. Le dernier survivant de leur confrérie était le vigilant von Korden, un homme dont l’impitoyable conviction avait envoyé criminels et innocents au bûcher. Von Kordden était persuadé que Mannfred agissait en secret depuis le cœur du vallon Ténébreux et avait soigneusement identifié les agents du Vampire tandis qu’ils vaquaient à leurs manigances. Lorsque les attaques des Morts-Vivants se multiplièrent, von Korden arrêta ses recherches et se prépara à la guerre ouverte.

Dès que la convocation de Volkmar atteignit von Korden à Konigstein, le Répurgateur laissa ses hommes à leur surveillance et partit au nord, en direction du fleuve Stir. Là, il rassembla ses derniers pfennigs pour payer le passage à bord d’une barge de commerce en partance pour Altdorf. Il entendait faire son rapport directement au Grand Théogoniste, pour l’entretenir des divers périls qui menaçaient l’est de l’Empire et solliciter le rôle de guide de l’expédition qui ne manquerait pas d’être organisée. Von Korden consacra le reste du voyage à noter tout ce qu’il savait à propos de la Sylvanie. Avec l’aide de von Korden la croisade de Volkmar pourrait progresser rapidement en Sylvanie et pourfendre directement son cœur noir.


ÉTUDE DU VALLON TÉNÉBREUX
Par Alberich von Korden. Destinée à son éminence le Grand Théogoniste Volkmar et à lui seul.
L’Échine Brisée : Les pics de l’Échine Brisée ne sont que des collines comparés aux Montagnes du Bord du Monde, mais ils n’en forment pas moins une barrière contre le mal. Sans eux, les vents éthériques qui soufflent en Sylvanie pousseraient les armées des morts plus loin au Stirland, dans le Moot, voire au-delà du Bief de l’Aver. En l’occurrence, les vents venimeux sont contenus dans l’arrière-pays, et maints puissants Morts-Vivants avec eux.

Le Bois de la Famine : Le Bois de la Famine est la plus honni de toutes les forêts de Sylvanie. Même mes hommes les plus endurcis refusent d’y entrer. Des chasseurs de prime téméraires et des mercenaires ignares s’y rendent chaque année pour fouiller les ruines en quête de Malepierre et d’autres trésors. Jusqu’ici, un seul d’entre eux en est revenu. Sa compagnie se perdit dans les bois et les soudards durent manger la chair de leurs compères pour subsister. Les rescapés succombèrent à l’appel des Goules qui hantent la forêt. J’éprouve un dégoût particulier pour le cannibalisme et ne suis pas pressé de devenir ce que je chasse, ni de voir quiconque s’infliger un tel destin. Je recommande donc d’éviter le Bois de la Famine à tout prix.

Hellsein : Froides et graisseuses, les eaux du lac Hellsein sont aussi noires que le cœur d’un gibier de potence. La fourche formée par le fleuve Stir offre une voie directe vers la berge nord du lac Hellsein, et donc vers l’entrée du Vallon Ténébreux lui-même, sans avoir à risquer une bataille ouverte avec les Morts-Vivants. En outre, le fleuve est sans conteste la route la plus rapide pour rallier Altdorf au vallon. Les eaux du lac sont empoisonnées, mieux vaut donc éviter tout contact avec elles. Parmi les ossements disséminés sur ses rives, on peut voir les restes de terreurs tentaculaires et les carcasses de cétacés à bec que je ne saurais décrire précisément.

La Lande Lugubre : C’est dans les marécages puants de la Lande Lugubre que Konrad le Sanguinaire livra son dernier combat et trouva la mort véritable. Il affronta les armées des hommes et des Nains à la tête de vastes légions de squelettes prélevés dans les anciens tertres et cairns qui encombraient le marais. La justice l’emporta : la bête fut abattue et mise au bûcher. Aujourd’hui encore, la tourbe de ce domaine est toujours truffée d’os. L’homme avisé fait un détour par l’ouest, par Ulfheim.

Les Chutes du Désespoir : Si vous remontez les cours d’eau qui alimentent le lac Hellsein jusqu’à leur source, vous trouverez les Chutes du Désespoir. En ce lieu, c’est comme si la terre elle-même était meurtrie, car ce n’est pas de l’eau qui tombe en cascades, mais du sang souillé. Il y a quelques semaines, la brume qui monte du bas des chutes infecta l’esprit de Jensen, mon porte-bannière. Il sombra dans une rage meurtrière avant de retrouver ses esprits pour constater le carnage qu’il avait causé. J’ai dû l’exécuter sur-le-champ.

Ulfheim : Bien que ses habitants soient des païens verruqueux et ses aubergistes de fieffés imbéciles, Ulfheim est un îlot de sécurité dans une mer de danger. Sa palissade fut érigée pour repousser les tribus bestiales de la Grande forêt, mais elle fonctionne aussi bien contre les Morts-Vivants. Une poignée de pfennigs et un discours bien senti vous ouvriront bien des portes.

Fort Oberstyre : Les voyageurs empruntant la route de l’ouest devraient connaître l’histoire du Fort Oberstyre. Mis à sac par Konrad et ses chevaliers Vampires, le fort fut rebâti et occupé par celui qui avait triomphé de la bête, le comte Helmar du Stirland. Cette garnison périt à son tour par la magie de Mannfred. Par pure cruauté, von Carstein invoqua les esprits des victimes de Konrad pour les envoyer contre leurs remplaçants.

La Tour Konigstein : Baptisée en l’honneur d’un roi des temps anciens, la Tour Konigstein s’est effondrée sous le poids des ans et il n’en reste plus que quelques ruines. Je suis convaincu que c’est là que s’est établi Ghorst le Nécromancien, fantoche de Mannfred. Prêtez-moi un canon pour aller frapper à sa porte et j’en apporterai la preuve incontestable.

Les Châteaux Sternieste et Drakenhof : Votre éminence aura noté que j’attire davantage son attention vers le Château Sternieste que vers Drakenhof. Je crois non seulement que von Carstein est toujours actif en Sylvanie, mais aussi qu’il est l’instigateur de cette malédiction. Le simple fait que des agents encapuchonnés et des carrosses ornementés convergent vers Sternieste devrait suffire à éveiller les soupçons, mais j’ai moi-même aperçu un seigneur très pâle sur ses remparts. Avec votre appui, messire, le Vampire brûlera avant la fin de l’année.

Sombres Prémices

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Volkmar le Sévère a réuni ses plus fervents guerriers et descendu le fleuve Reik avec un vœu sacré aux lèvres. Sa destination était la Sylvanie, province en proie au trouble, terre de terreurs dépassant l’imagination, et repaire de l’infâme comte Mannfred, créature maléfique immortelle qu’il faut détruire à tout prix.

Sur la route du sud, Volkmar commanda à ses hommes de trouver le Vampire et de réduire son corps en cendre. En traquant et en questionnant les lieutenants et les pantins du comte, les croisés pourraient trouver le chemin menant à la porte de von Carstein. Le Répurgateur von Korden est le premier à loger son gibier : un Nécromancien à la solde de Mannfred du nom de Ghorst. Alors que von Korden et ses acolytes s’enfoncent dans les landes jonchées de tombes, les morts titubent dans la brume pour venir à leur rencontre…

La Croisade en Marche

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Les Fils de Sigmar
Parmi les croisés envoyés pour soutenir Volkmar, il y avait les Fils de Sigmar, une formation exclusivement composée de guerriers vétérans et de tueurs impitoyables ayant servi mois d’un an auparavant au sein du régiment des Masques Rouges, qui avait combattu les adeptes du Chaos aux côtés de Volkmar.

Les Masques Rouges avaient fait forte impression auprès du Grand Théogoniste lors de la campagne contre les tribus nordiques, en refusant obstinément de reculer face aux hordes braillardes des barbares. Volkmar en personne fit leur éloge et les rebaptisa les Fils de Sigmar en reconnaissance de leur bravoure. Depuis ce jour, ils ont instauré la tradition de se faire tatouer le marteau de Sigmar sur le torse en mémoire des louanges de Volkmar. Certains d’entre eux vont jusqu’à se faire tatouer des scènes de la vie de Sigmar sur tout le corps, en espérant qu’une telle dévotion leur prêtera de la force dans les moments les plus critiques, c’est-à-dire au plus fort des combats.

Bien que les Fils de Sigmar se vantent d’être aussi bons guerriers que les chevaliers de l’Empire - et l’ont prouvé à maintes reprises -, leur arme la plus puissante contre le mal est leur foi. Lorsque la bataille éclate, la juste colère qui enflamme leurs cœurs les pousse droits dans les rangs ennemis, où leurs épées tailladent sans merci.

Quand Karl Franz requit l’assistance du Talabecland, le kriegmarshal s’arrêta d’abord aux baraquements des Fils de Sigmar. Là, il désigna les meilleurs d’entre eux pour rejoindre la croisade, jugeant que Volkmar aurait besoin d’une troupe d’hommes de confiance en vue des jours sombres à venir.

Les Fils de Sigmar

Il ne fallut pas longtemps au Grand Théogoniste et à l’aîné des Archilecteurs, Kaslain, pour apprêter un cadre des membres les plus pieux en Sylvanie. Toutefois, même si Karl Franz avait approuvé sans réserve l’entreprise de Volkmar, l’Empereur ne pouvait pas se permettre de renforcer la croisade bourgeonnante du Grand Théogoniste avec l’armée impériale d’Altdorf.

En effet, si l’Empereur lui-même se rendait en Sylvanie à la tête d’une grande armée, les maîtres putatifs de la province y verraient un signal trop évident, qui inciterait certainement Mannfred von Carstein à se cacher davantage au lieu de l’attirer à découvert, car le scélérat était aussi réputé pour sa ruse que pour sa malveillance. Par ailleurs, et même si la caste des officiers impériaux ne l’admettrait jamais, seule une petite force pouvait être détachée des casernes d’Altdorf.

L’Empire était assailli de toutes parts, et la guerre contre les adorateurs du Chaos du nord prélevait un tribut de plus en plus lourd, sans monter le moindre signe de résolution. L’Empereur demanda donc au kriegmarshal du Talabecland, une puissante province frontalière du Stirland, d’envoyer secrètement un détachement à la rencontre de la croisade de Volkmar sur le Reik.

Le kriegmarshal du Talabecland ne se souvenait que trop bien des événements du Conclave Étatique. Il accéda de son mieux à la requête de Karl Franz, en dépêchant auprès de Volkmar des guerriers réputés pour leur force d’âme. La compagnie qu’il sélectionna était restreinte mais puissante, avec, entre autres, des troupes régulières, des artilleurs et des chevaliers. Elle comptait des adeptes de Myrmidia et de Sigmar, tous sûrs de leur foi. Bien que cette armée semblât disparate, ses soldats étaient unis par le désir ardent d’abattre les laquais des ténèbres.

Au Cœur des Ténèbres

À Altdorf, Volkmar se rendit sur les quais donnant sur le fleuve Reik. Là, les guerriers embarquèrent à bord de la grande barge cuirassée Luitpold III, un léviathan à vapeur bardé de canons, assez gros pour accueillir dans ses vastes cales non seulement l’Autel de Guerre de Volkmar, mais aussi une armée entière. Cette nuit-là, les soldats du Grand Théogonistes descendirent le Stir en priant dans le silence. La lune éclairait une silhouette se tenant à la proue de la barge : von Korden le Répurgateur, un sourire naissant aux lèvres.

La croisade continuait sa course sur le Stir et traversa la Drakwald. La masse de la barge cuirassée dissuada les tribus bestiales qui hantaient ces bois de passer à l’attaque. Chaque jour, von Korden ordonnait à l’équipage du Luitpold de pelleter encore plus de charbon dans les chaudières du navire, au point d’asphyxier le fleuve avec la fumée. La barde progressait vite, faisant halte seulement à Kemperbad pour charger du combustible avant d’atteindre la frontière du Talabecland.

Lorsque le convoi arriva à Leitzigerford, Volkmar dut faire appel à toute sa volonté pour ne pas laisser paraître sa colère et sa déception. La force envoyée au point de rendez-vous par le kriegmarshal du Talabecland comptait moins de cinquante hommes. Certes, les temps étaient durs, et les Hommes-Bêtes étaient une menace, mais le fait que Talabheim accorde une aide si minime n’augurait rien de bon pour la suite de la croisade. Néanmoins, à la vue de ses vieux camarades des Fils de Sigmar, l’humeur de Volkmar s’adoucit un peu. Le Luitpold repartit.


Comme les marches de Sylvanie se dessinaient à l’horizon, von Korden se rendit une nouvelle fois à la proue. À l’évidence, la malédiction qui frappait la province avait gagné en force. C’était comme si un rideau de nuit avait été tiré devant le ciel. Volkmar rejoignait le Répurgateur en secouant la tête de consternation. L’équipage chuchotait et s’agitait dans leur dos. Le capitaine du Luitpold accepta d’emmener les croisés jusqu’aux berges du lac Hellsein, mais pas plus loin. À partir de là, la croisade devrait continuer à pied.

Un Accueil Inamical

La croisade faisait ses préparatifs pour la longue marche dans le Vallon Ténébreux à la lueur des jours crépusculaires de Sylvanie. Or, son arrivée avait été remarquée. Alors que les troupes serraient leurs guêtres et que les plus forts des Fils de Sigmar déchargeaient l’Autel de Guerre du Luitpold, les ossements monstrueux éparpillés sur les bas-fonds commencèrent à frémir. Des vertèbres plus grosses que le poing roulèrent et s’assemblèrent en colonnes et les serres se rattachèrent à des griffes énormes.

Animés par des forces innommables, les squelettes gardiens du lac projetaient un crachin saumâtre en se relevant. Les monstres avançaient dans l’eau avec une lenteur irréelle, leur pas lourd les menant vers les soldats choqués. Le Grand Théogoniste était déjà en train de patauger dans le lac, fonçant droit sur les bêtes, von Korden à ses côtés. Le Répurgateur pulvérisa un crâne à trois orbites avec un tir précis de ses deux pistolets revêtus d’argent. Volkmar brailla une prière de guerre à Sigmar et plongea son poing rayonnant dans le lac. Une lumière dorée infusa les eaux autour de lui. Elle vint s’enrouler autour des jambes des sentinelles immondes, dissipant la magie impie qui avait ranimé les créatures. Un par un, les immenses squelettes s’écroulèrent dans l’onde.

Ragaillardis par cette victoire, les croisés quittèrent les berges du lac Hellsein la tête haute. Ils contournèrent la Lande Lugubre et les pierres levées du cercle éponyme pour se diriger au sud-ouest. Ils atteignirent la palissade d’Ulfheim à la nuit tombée, du moins c’était ce qu’il leur semblait, le jour et la nuit devenant de plus en plus difficiles à distinguer.

Les paysans d’Ulfheim étaient soulagés par l’arrivée de soldats dans leur bourgade et ne se souciaient guère de leur origine ; en revanche, ils furent ébahis de voir le Grand Théogoniste en personne. Après la séance de courbettes, les gens d’Ulfheim donnèrent à boire et à manger aux croisés et leur victoire au lac fut fêtée dignement.

Comme le ciel s’éclaircissait, Volkmar lui-même alla tirer ses hommes du sommeil à coups de botte, causant un réveil doublement douloureux à ceux qui avaient abusé de la boisson la veille. Il scinda la croisade en deux groupes, afin de réduire les chances de détection et de hâter la traque des agents de Mannfred. Volkmar conduisit son escorte à Fort Oberstyre, tandis que von Korden se rendait à la Tour Konigstein. Ce plan convenait très bien au Répurgateur, qui soupçonnait depuis longtemps que Konigstein abritait un de ses vieux ennemis : Ghorst le Nécromancien.

Divergences

Si de nombreux dignitaires du culte sigmarite se contentaient d’intriguer dans le sanctuaire des temples d’Altdorf, le Grand Théogoniste s’était toujours voué corps et âme à la chute des puissances des ténèbres. Von Korden avait déjà pu constater de ses propres yeux que Volkmar était prêt à risquer sa vie au combat et cela n’avait fait que renforcer son respect pour l’homme. Toutefois, on racontait que sa ténacité pouvait se révéler sa pire ennemie. Or, de l’avis du Répurgateur, la foi aveugle ne suffirait pas à remporter cette bataille.

Von Korden savait aussi bien que n’importe quel général que l’Empire devait utiliser toutes les armes à sa disposition s’il voulait vaincre les hordes du mal. Il comptait utiliser le sémaphore des tourments sis près de la Tour Konigstein pour appeler ses alliés à l’aide - pour ce faire, le Répurgateur y avait placé une garnison une semaine plus tôt. Si Volkmar apprenait que von Korden pensait que la croisade sigmarite était incapable d’accomplir sa mission sans aide extérieure, il y a fort à parier qu’il l’excommunierait sur-le champ. Comme le Grand Théogoniste se dirigeait vers Fort Oberstyre, il n’avait pas besoin de savoir que son allié sollicitait des renforts.

Pour assurer la sécurité de von Korden, Volkmar avait détaché deux unités de troupes régulières, mais aussi les célèbres Chevaliers du Soleil et, sur requête du Répurgateur, une pièce d’artillerie pour creuser une brèche dans la Tour Konigstein si nécessaire. Von Korden était impatient d’en découdre ; Ghorst le Nécromancien était certainement un des acolytes de Mannfred. En le tuant et en mettant sa tanière à sac, von Korden découvrirait probablement des indices sur la position du Comte Vampire et réglerait une vieille dette au passage.

Le Marteau à Sorcières

Le redoutable Fort Oberstyre possédait autrefois quatre batteries de canon, ce qui avait coûté horriblement cher au Comte Électeur du Stirland. À présent, la plupart d’entre eux sont muets. Même l’Ingénieur le plus résolu songera à leur récupération à deux fois en voyant les spectres meurtriers qui traversent les murs du château en gémissant. Pourtant, un de ces canons continue de servir l’Empire.

Le '« 'Marteau à Sorcières' »', tel qu’il fut baptisé, est l’un des rares canons détachés de Fort Oberstyre avant que la place forte fût abandonnée aux fantômes. Il gagna son nom lors de l’épisode de l’Incendie de Gorstanford, en 2502, l’année tristement célèbre qui vit le jeune von Korden traquer et juger une infâme sorcière connue sous le nom de Chouette Grise. Attachée à un bûcher sur la grand-place, la sorcière était condamnée à être brûlée vie. Le feu fut allumé par la propre torche de von Korden, mais la foule qui s’était rassemblée pour assister à l’exécution constata avec horreur que la maudite femme ne brûlait pas. Au contraire, elle gloussait de plus en plus fort, les feux crépitants du bûcher répondant à son hilarité. Ses rires montèrent crescendo et les flammes bondirent comme des êtres vivants, mettant le feu au chaume des bâtiments entourant la place. Gorstanford fut incendiée en quelques minutes et ses habitants déguerpirent en proie à la panique. La Chouette Grise était indemne, s’esclaffant hystériquement au centre du brasier.

Le désastre ne fut contenu que lorsqu’un grand canon impérial qui était en réparations chez le forgeron de la ville fut amorcé à la hâte, chargé avec le premier tas de métaux (un seau de fers à cheval) et mis à feu. Bennec Bistrefeu, le maréchal-ferrant, soutient que ce jour-là, Sigmar était avec lui, car le canon tint le choc et la mitraille improvisée réduisit la sorcière en charpie dans une grosse explosion de viande. Bien que le canon ait été affecté à l’armée du Talabecland lors de la Grande Battue de 2520, Bistrefeu fait toujours partie de ses servants et a ajouté plusieurs sorcières et chamans à son tableau de chasse depuis sa conscription.

Premier Heurt

Les Balles d’Argent

Les manquements des Balles d’Argent à la discipline étaient comblés par leur dextérité. Ces arquebusiers soutiennent qu’ils tirent des balles chemisées d’argent à chaque volée, mais la vérité est que chacun d’eux ne reçoit qu’une seule balle d’argent de leur chef tireur d’élite mal embouché, Bredt le Charretier, le jour de leur intégration dans le régiment. Il s’agit autant d’un talisman que d’une arme, et chaque arquebusier ne s’en servira qu’en tout dernier recours. Les hommes de Bredt croient qu’aussi longtemps qu’ils gardent leur porte-bonheur bien au chaud, ils sont protégés contre tout ce que la Sylvanie leur réserve.

Von Korden et ses hommes arrivèrent à la Tour Koningsein bien après la tombée de la nuit. Une ruine surgissait de la brume qui coiffait la colline, des feux fantomatiques luisaient dans les orbites vides de ses fenêtres. Le Répurgateur pouvait sentir le mal réant en ce lieu lui chatouiller la peau. Les arpents de terre qui l’entouraient étaient parsemés de statues brisées, de stèles et de tombes béantes. Près de là, l’ancienne tour de guet où von Korden avait placé une garnison chargée de surveiller le canton en son absence, était toujours debout, mais ne donnait aucun signe de vie.

Comme von Korden se rapprochait, il pouvait voir que les fenêtres de la tour de garde avaient été brisées et que la sentinelle de cuivre à son sommet pendait, inerte. Le Répurgateur cracha dans la boue. Les hommes qu’il avait laissés là avaient probablement été tués par les serviteurs de Ghorst et n’avaient même pas pu actionner le sémaphore pour envoyer un signal d’alarme. Von Korden ordonna à ses soldats de former la ligne et d’apprêter le Marteau à Sorcières. « Il y a des Morts-Vivants là-bas, aussi sûr que ces tombes sont vides. » murmura-t-il à ses hommes.

Le lourd silence fut rompu par le cri d’alarme d’un arquebusier des Balles d’Argent. Alors qu’ils se mettaient en formation, le pied d’un des hommes avait traversé le bois vermoulu d’un cercueil vide. Des rires nerveux secouèrent leurs rangs tandis que le maladroit se relevait, ses excuses à moitié sarcastiques se réverbérant étonnamment fort dans le brouillard.

Le regard haineux, von Korden marcha d’un pas vif vers les tireurs. Il s’arrêta brusquement, reniflant l’air. Un gémissement grave s’éleva de la tour délabrée. Aussi lentement que dans un rêve, les cadavres pâles qui peuplaient naguère le cimetière avançaient dans la brume. Des cannibales dégénérés se déplaçaient furtivement derrière eux, comme des chiens avides de restes de viande. Un hurlement effroyablement proche retentit, suivi d’un chœur de lamentations comme des monstres écorchés qui étaient autrefois des loups surgissaient de l’ombre. Ghorst lui-même s’était montré, juché sur son attelage macabre, faisant retentir le glas de sa cloche. Von Korden arme les chiens de ses pistolets ; il était temps de renvoyer les morts dans leurs tombes.

Les Chevaliers du Soleil
Les Chevaliers du Soleil menant la charge.
Comptant parmi les plus fameux ordres de chevalerie de l’Empire, les Chevaliers du Soleil sont une puissance à eux seuls. Leur ordre fut fondé il y a des siècles, au cours des croisades d’Arabie, bien que son destin changeât irrévocablement à la Bataille de Magritta. La statue de la Déesse guerrière Myrmidia se détacha du sommet du grand temple et s’effondra sur l’émir de l’armée arabienne, ce qui renversa le cours de la bataille.

Depuis ce jour, les Chevaliers du Soleil sont de farouches adeptes de Myrmidia, au point de lui ériger un temple imposant dans la cité de Talabheim. Contrairement aux autres croisés de l’Empire qui ont fait le voyage en Sylvanie, ils n’ont pas été sélectionnés par le Grand Théogoniste sur la base de leur foi en Sigmar. Ils demandèrent eux-mêmes à rejoindre la croisade, leur précepteur, Lupio Blas, faisant le serment qu’ils donneraient leurs vies pour défendre Volkmar. Le Grand Théogoniste déclina d’abord cette offre, mais leur fougue et leur détermination étaient telles qu’au dernier moment, il céda et les laissa embarquer à bord du Luitpold III avec le reste de la croisade.

Les motivations des Chevaliers du Soleil restent obscures. Leur foi dans une divinité de l’Empire - même s’il s’agit d’un ajout récent au panthéon - est indubitable. Bien qu’il garde son avis sur le sujet pour lui, Volkmar pense que ce sont les rumeurs de ténèbres rampantes qui ont incité les adeptes de Myrmidia à se joindre à la croisade - après tout, le soleil d’été est un des symboles de la déesse. L’étrange credo de l’ordre pourrait se révéler une arme puissante contre les Morts-Vivants, aussi efficace, peut-être, que le zèle ardent des sigmarites eux-mêmes.

La Battue de Minuit

Blessé et craignant pour sa vie, Ghorst doit fuir devant la fureur des quelques fidèles, mais pas avant d’avoir sévèrement troublé les soldats de l’Empire envoyés pour l’arrêter. Von Korden et ses hommes ne réalisent pas que Ghorst a sa propre mission et que Mannfred von Carstein est bien plus proche qu’ils ne le croient…

Croisade Triomphale

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Volkmar, l’Éminent Disciple

Pour le commun des mortels, Volkmar le Sévère est un parangon du culte sigmarite, un noble patriarche béni par le dieu-guerrier et forçant le respect des prêtres comme des guerriers. Il est probable que la déférence de ses suivants renforce cette impression. Sa mine austère, sa carrure imposante et son caractère rigoriste en font une force indomptable dont l’opiniâtreté déteint sur les guerriers qui le suivent à la bataille.

Seuls les Archilecteurs de Volkmar savent ce qu’il en est vraiment. En privé, les épaules du Théogoniste retombent sous le poids écrasant de ses années de service. Son corps est scarifié et brûlé en une centaine d’endroits et ses os ont été brisés et ressoudés à de multiples reprises, conséquences des innombrables batailles qu’il a livrées contre les adorateurs du Chaos du nord.

Beaucoup de politiciens de premier plan voient en lui une nuisance, un empêcheur de comploter sereinement entre hommes sages, et les bonimenteurs d’Altdorf et d’ailleurs s’efforcent de ternir sa réputation. Mais Volkmar n’est pas un homme de discours et laisse ses actes parler pour lui.

Les partisans de Volkmar sont proportionnellement mieux représentés parmi la populace de l’Empire. Sa bravoure et sa probité infaillibles lui ont valu le respect, voire l’admiration d’une bonne part de l’armée impériale, qui suivrait le vieil homme dans l’autre monde s’il le leur demandait. Pour le commun du peuple, Volkmar est un héros de la trempe des anciens rois. Il est le successeur spirituel de Heldenhammer, une légende vivante pour tous ceux qui se réclament du credo sigmarite. Certains de ses adeptes les plus fanatiques murmurent qu’autrefois, Sigmar eut un enfant illégitime et que Volkmar est le dernier descendant de cette lignée - rumeur que le culte sigmarite ne cherche guère à dissiper. Quelle que soit la vérité, on ne peut nier que Volkmar exsude une aura de puissance divine, un pouvoir amplifié par les artefacts que le culte lui a confiés.

Lorsque Volkmar se rend à la bataille, il monte sur l’Autel de Guerre de Sigmar, un imposant attelage d’acier et de bois de la Drakwald. Orné de parchemins votifs, de reliquaires et de dévotions, l’Autel est un temple mobile dédié au dieu-guerrier de l’Empire. Au pupitre est accroché le Cor de Sigismund, un artefact forgé par les Nains qui reproduit le cri de guerre du fameux Empereur Sigismund. Cabré au-dessus de Volkmar, on contemple le Griffon d’Or, symbole de Magnus le Pieux et source d’un grand pouvoir mystique dans lequel Volkmar peut puiser pour bannir les Morts-Vivants et les Démons. Pourtant, aussi spectaculaire qu’apparaisse le Grand Théogoniste avec toute sa panoplie de guerre, c’est sa sagesse que l’Empereur Karl Franz estime le plus.

Toutes les nuits, à l’heure où s’endorment les citoyens ; le Grand Théogoniste allume une torche et descend dans les cryptes secrètes du sous-sol du Palais Impérial, où les volumes interdits de la collection de l’Empereur sont entreposés. Là, Volkmar cherche toute bribe de savoir qui l’aidera à gagner sa longue guerre contre les puissances impies, persuadé qu’il est que la force des armes n’y suffira pas.

Le prêtre n’a confié son inquiétude quant à ses découvertes qu’à ses plus proches conseillers - notamment à propos d’une prophétie annonçant une grande bataille entre le bien et le mal qui provoquera la destruction du monde dans un cataclysme de feu magique. Mais ce n’est pas là tout ce que ses recherches ont révélé. Il y a deux ans, le Grand Théogoniste avait entrevu des signes indiquant que la dynastie von Carstein n’était pas aussi éteinte que les ménestrels du Palais Impérial aimaient à le chanter. Ses soupçons se vérifièrent lors du Conclave Étatique, avec l’apparition dramatique du cadavre du Répurgateur Stahlberg qui alluma une flamme qu’on ne pourrait éteindre qu’avec le sang du meurtrier. Le nord n’était pas le seul endroit qui avait besoin de la lumière de Sigmar : à l’est, la Sylvanie devait être sauvée des terreurs de la non-vie.

Quelques jours après la déclaration de sécession de Mannfred, Volkmar rassembla une armée de fidèles. Il entendait tuer le Vampire, récupérer la Couronne de Sorcellerie et libérer la Sylvanie de son carcan de ténèbres, pour la ramener dans le giron impérial avant qu’il ne soit trop tard. Pour Volkmar, c’était là le devoir de tout bon fils de Sigmar.

Volkmar le Sévère, l’Éminent Disciple

Tandis de von Korden se mesure au sinistre Ghorst, Volkmar s’aventure plus profondément dans la Vallée des Ténèbres, défiant ouvertement le comte Mannfred - venez m’affronter ou disparaissez dans le néant. Bientôt les Morts-Vivants se relèvent pour contrer les intrus, mais les pantins du Vampire sont rapidement défaits par la force de la foi du Grand Théogoniste.

Après avoir contraint Ghorst le Nécromancien à lâcher son étreinte sur Konigstein, von Korden le Répurgateur et ses fidèles soldats reçoivent les renforts de la croisade de Volkmar au moment où la bataille éclate sur la route exposée. La réunion des héros entraîne une victoire rapide, et la croisade de l’Empire reprend sa marche, plus forte que jamais. Toutefois les choses se corsent devant Swartzhafen, où le Grand Théogoniste et Mannfred von Carstein se rencontrent enfin sur le champ de bataille.


La Route d’Oberstyre

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Marcher au côté de Volkmar à la tête de son armée revenait à contempler un homme possédé. Le vieil homme à la forte carrure crépitait littéralement d’une énergie contenue tandis qu’il chevauchait dans la vallée, beuglant ses ordres et frappant ses poings l’un contre l’autre dans son empressement à combattre. Sa voix brisa le silence. Von Korden pouvaient bien avoir les villages et les hameaux ; l’élite sigmarite irait bannir les fantômes de Fort Oberstyre, puis se rendrait à l’est vers Deihstein. Tout ce qui s’interposerait brûlerait.

Dans le sillage de terre retournée du Grand Théogoniste avançait la silhouette en armure de plates de l’homme de confiance de Volkmar : Kaslain. L’Archilecteur était escorté par une bande de fanatiques aux pieds nus et aux yeux fous - des zélotes qui suivaient l’Autel de Guerre où qu’il aille. Volkmar opinait du chef comme leur flot grossissait à mesure qu’il passait devant les fermes et les taudis délabrés qui bordaient la route. Âmes perdues ou non, si les rumeurs de la présence d’osts éthérés au Fort Oberstyre étaient vraies, leur foi en Sigmar le dieu-guerrier se révélerait plus utile que l’acier.

La croisade arriva au fort dans les dernières heures de ce qui passait pour le jour en Sylvanie. La place forte les regardait du haut de sa falaise par des centaines de meurtrières. Des coulures d’un épais liquide rouge suintaient de chaque ouverture telles des larmes de sang. Volkmar soupçonnait que c’était là tout ce qui restait des précédentes victimes de la forteresse.

Au sommet de l’édifice montaient des spires décorées de gibets et de vierges de fer. Les croisés ne ralentirent pas et ne firent aucun commentaire car leur foi était grande. Ils parcoururent les pierres pointues de la chaussée menant à la porte titanesque de Fort Oberstyre.


Les Âmes en Lambeaux
Les Âmes en Lambeaux
Vêtus de toile de jute et de cordes, les confrères zélotes qu’on appelle les Âmes en Lambeaux suivent le Grand Théogoniste partout où il va - que cela lui plaise ou non.

Chaque Prêtre-Guerrier de Sigmar s’est vu infliger, à un moment ou un autre, la compagnie de ce genre d’énergumènes vociférant et de prédicateurs de la Fin des Temps alors qu’il tente d’accomplir vaillamment son apostolat. Les Âmes en Lambeaux comptent parmi les plus étranges de ces groupes hors normes. Leur fondateur, le prophète autoproclamé Gerhardt le Ver de Terre, était à l’origine un des acolytes de Volkmar lors de la guerre contre Archaon dans le grand nord. Désormais, il ne reste plus grand-chose de son ancienne personnalité, comme si son délire religieux était une maladie, et hautement contagieuse.

Lorsque les dévotions des Âmes en Lambeaux les font piétiner et frissonner et se plonger dans une pieuse extase à coups de fléaux barbelés, les passants déchirent leurs vêtements et leur arrachent les cheveux par poignées. Les spectateurs sont enflammés par leur aura de ferveur et se joignent à la danse frénétique de la troupe en ramassant les haillons et les fouets de ceux dont le corps s’est révélé trop faible pour contenir toute la foi de son âme. Certains retrouvent leurs esprits à la nuit tombée et retournent à leurs épouses, sales et sanguinolents, avec un plain-chant aux oreilles. D’autres abandonnent leur vie d’avant et suivent la croisade des Âmes en Lambeaux jusqu’à la mort. Leurs voix se mêlent en prières à Sigmar, tantôt fortes et confiantes, tantôt brisées et peinées. Tous croient fermement que la fin est proche et qu’on ne pourra l’empêcher qu’au prix du sacrifice de l’Empire, afin qu’un nouvel ordre humain naissent de ses cendres.

La Forteresse Maudite

Alors que la croisade approchait de la porte de Fort Oberstyre, des spectres luminescents se mirent à voler en cercle autour des spires. Leurs voix perçantes promettaient une horrible mort aux fidèles qui tiraient l’Autel de Guerre sur le pont-levis vermoulu menant au porche.

Volkmar ne les écoutaient pas. D’un geste impatient, il désigna la porte à Kaslain. Le prêtre en armure s’inclina et décrocha une grande relique de son dos : le Marteau du Reik, forgé à l’aube de l’Empire. L’Archilecteur fit quelques moulinets avec le maillet étincelant pour s’échauffer, avant de l’abattre en poussant un rugissement d’effort. La grosse tête de métal laissa deux comètes lumineuses dans l’air et frappa durement le chêne épais de la porte : les deux battants furent pulvérisés dans une explosion assourdissante. Un rideau de poussière et de sang séché tomba des murs en cascade, si bien que les zélotes en dessous toussaient autant qu’ils s’égosillaient de joie. Volkmar approuva par un léger hochement de tête - il n’en attendait pas moins. La troupe passa la porte avant même que les débris fussent tous retombés.

La nuit qui vit les croisés entrer dans Fort Oberstyre fut longue et pénible. On n’entreprend pas un grand exorcisme à la légère et les fantômes que Mannfred avait liés à la forteresse hurlèrent jusqu’à pousser les intrus à douter de leur santé mentale. Mais la confiance en soi de Volkmar était contagieuse. Le prêtre grisonnant arpentait les coursives et les corridors tel un roi conquérant. La pureté et l’intensité de sa foi consumaient les ombres ondoyantes jusque dans les derniers recoins de l’édifice et les coups de marteau de guerre béni exilaient les esprits assez désespérés pour surgir des murs moites.

Même si la foi des zélotes en haillons qui l’accompagnaient n’était qu’un amas de chandelles comparée à la conflagration de la conviction de Volkmar, ils purgèrent les caves d’Obertsyre des dégénérés qui nichaient là, leur ferveur et leur dévotion les poussant à lutter aussi durement dans la noirceur des celliers qu’à la lumière du jour.

Au matin, il n’y avait plus une seule âme maléfique à l’intérieur de la forteresse. Enfin, la malédiction séculaire d’Oberstyre avait été levée.


Les Diables de Swartzhafen
Les Diables de Swartzhafen
Les horreurs ailées connues de la paysannerie de Sylvanie sous le nom de Diables de Swartzhafen ne sont pas des bêtes à proprement parler. Ce sont en fait des Vampires dégénérés qui furent capturés par le plus puissant représentant de leur engeance et transformés par la Magie Noire en des créatures qui reflètent mieux la noirceur de leurs âmes.

Ils étaient autrefois les fils fringants de la dynastie von Carstein et chacun d’eux avait été engendré par un des frères de ténèbres de Mannfred. Malgré leur jeunesse, leur coterie constituait un soutien important du pouvoir des von Carstein. Si on pouvait facilement remettre un de ces Vampires juvéniles à sa place, la réunion des trois pouvait en remontrer à ses aînés, même à Konrad le Sanguinaire. C’est ainsi que les Diables von Carstein, comme ils s’étaient baptisés, survécurent aux turbulences des temps anciens.

Mannfred était passé près de l’anéantissement lors des Guerres Vampiriques. Le temps qu’il se remette de sa défaite à Hel Fenn, les Diables avaient étendu leur influence à toute la vallée. Le comte décida que ses neveux présomptueux devaient apprendre quel était leur rang. Il les traqua pendant les heures du jour, puis il les lia à leurs cercueils respectifs grâce à un rite mortuaire de Nehekhara. Ils restèrent pris au piège dans les grottes sous le château de Swartzhafen pendant de longues années, tandis que leurs enveloppes se métamorphosaient sous l’effet de l’eau souillée de Malepierre qui suintait sur leurs sarcophages. Les monstres que Mannfred finit par libérer avaient perdu toute trace d’intellect. Désormais, les Diables hantent la nuit sur ordre du comte, fondant sur ses ennemis pour les tailler en pièces pendant que leur maître se délecte du spectacle.

La Longue Marche

Bien que la foi eût remporté une grande victoire, le Grand Théogoniste ne s’était guère rapproché de sa proie. À l’aube du troisième jour, la croisade reprit la route de Konigstein. Elle croisa de nombreux chars à bœufs, traîneaux et mules bâtées ; les paysans verruqueux qui menaient ces processions miséreuses levaient des yeux sidérés vers l’Autel de Guerre au passage du glorieux attelage de Sigmar - des réfugiés, pensa Volkmar, pressés de traverser les frontières de Sylvanie avant de subir la malédiction de Mannfred. Il n’avait pas le cœur de blâmer cet exode car la végétation du bord de la route était déjà en train de pourrir. La terre elle-même se mourait.

Alors que la croisade approchait de la ville de Deihstein, le fracas lointain des épées les incita à presser le pas. Ils coururent dans la boue en oubliant la fatigue de leur longue marche, remplacée par l’urgence du combat. Du haut de la crête de Deihstein, le Grand Théogoniste vit une bataille chaotique opposant une caravane de cavaliers nomades Strigany aux soldats couverts de fange du contingent de von Korden. Au loin, une Charrette Macabre cahotait en direction du sud en entraînant la horde claudicante des morts derrière elle - c’était Ghorst le Nécromancien qui venait d’échapper aux hommes du Répurgateur grâce à l’attaque des nomades. Les Strigany, un peuple réputé servir les von Carstein depuis des générations, se déployaient jusqu’à encercler von Korden et ses soldats.

L’Autel de Guerre de Volkmar dévala la colline et renversa trois carrioles aux bâches bariolées qui bloquaient le chemin, écrasant de nombreux tireurs Strigany au passage. Quelques instants plus tard, un ost de sigmarites loqueteux se déversa de la crête boisée surplombant la route pour se jeter sur les archers à cheval qui rôdaient là. Les hommes de von Korden redoublèrent de courage, alors que le moral des Strigany fléchissait. Les nomades s’enfuirent au sud, en abandonnant leurs blessés dans la boue.

À l’issue de la bataille, von Korden approcha de l’Autel de Guerre tandis qu’on le replaçait sur la route. Le Répurgateur était littéralement couvert de sang et une lueur malsaine dansait dans ses yeux. L’interrogatoire des Strigany avait révélé bien des vérités. Si l’on en croyait les prisonniers, l’individu que les Strigany appelaient le Comte Blême n’était autre que Mannfred von Carstein. Il semblait finalement que le Vampire ne s’était pas installé à l’est de la vallée des Ténèbres, mais au sud, à Swartzhafen. D’autres créatures résidaient là également - un trio de « diables ailés » qui inspirait une profonde frayeur aux Strigany.

Après avoir pansé leurs plaies et reforgé leur détermination, les croisés marchèrent au sud. Ils firent étape dans la ville sanctuaire d’Arfeit et aucun ne se plaignit de la bonne nuit de sommeil qu’elle promettait. Si Mannfred était réellement à Swartzhafen et s’ils pouvaient s’y rendre avant la fin du jour suivant, ils avaient une chance de dissiper la malédiction du Vampire avant que la Sylvanie soit engloutie par les ténèbres.

Ils marchèrent promptement, mais alors que les tours de Swartzhafen se dessinaient, la lumière ténue de Sylvanie laissait place à l’épaisse noirceur de ses nuits. Puis soudain, les croisés virent un tableau à glacer le sang. Devant eux, alignée dans un champ embrumé où flottaient les pierres tombales des défunts de Swartzhafen, se tenait une immense armée de morts. Elle était totalement, effroyablement, immobile ; même les Goules qui tenaient les flancs étaient aussi figées que les statues commémoratives disposées à la périphérie de la ville. Au centre de l’armée se dressait une silhouette à la carrure impressionnante, engoncée dans l’armure de plates ciselées en forme d’ailes de chauve-souris typique des von Carstein et vêtue d’une cape rouge sang. Des monstres ailés volaient autour de l’observatoire du manoir délabré en arrière-plan.

La silhouette produisit une griffe pâle, invitant ironiquement Volkmar à des pourparlers - une vieille coutume aristocratique qui avait le don d’irriter le Grand Théogoniste : « Soit, il y aura conciliabule… Un concile de lames et de feu ! »


Le Seigneur Sépulcral de Sylvanie
Mannfred von Carstein, le Seigneur Sépulcral de Sylvanie
Mannfred von Carstein est le plus vieux et le plus puissant représentant d’une aristocratie secrète qui tenait autrefois tout l’Empire dans sa main. Un érudit qui fouillerait les écrits sur les Guerres Vampiriques conclurait que le fait que Mannfred est le dernier von Carstien à avoir survécu n’est pas un accident : c’est le plus rusé de sa race et il s’y entend en matière de trahison.

Le père de sang de Mannfred, l’infâme Vlad von Carstein, fut anéanti devant les murs d’Altdorf. Il fallut la combinaison d’une chute vertigineuse, d’un épieu de bois de douze pieds de long et du poids du corps du Grand Théogoniste Wilhelm III pour obtenir ce résultat. Mannfred était l’un des cinq prétendants à la succession de Vlad. Un par un, ses frères de ténèbres connurent une fin atroce - par les lames de la soldatesque de l’Empire, par les pieux des Répurgateurs, voire en se faisant découper en morceaux par leurs propres rivaux. Les Vampires de Sylvanie murmurent que chaque événement est l’œuvre de Mannfred, voire qu’il avait eu l’occasion d’empêcher le vol de l’Anneau des Carstein qui préservait Vlad de la mort véritable. Les détails exacts de ces affaires ont sombré dans les méandres du temps et Mannfred ne se presse pas de les déterrer.

Pendant que ses frères de ténèbres luttaient pour le pouvoir séculier, Mannfred voyageait au sud. Son périple le mena dans les déserts de Nehekhara, jusqu’aux ruines stupéfiantes de Lahmia. Là, il pénétra les secrets antiques de son engeance et apprit même les pratiques des cultes mortuaires néhékhariens en déchiffrant les hiéroglyphes des tombes pyramidales. Sa quête de connaissance le mena finalement jusqu’à Nagashizzar, la citadelle du Grand Nécromancien. Là, il fit une découverte majeure, au point d’en altérer le cours de l’histoire.

Mannfred revint plus puissant que jamais de l’exil qu’il s’était imposé, mais l’Empire était un prix qu’on ne remportait pas aisément. Suite à sa défaite contre une alliance d’hommes et de Nains à la Bataille de Hel Fenn, le Vampire s’évanouit dans l’ombre pour lécher ses blessures. Il attendit, avec la patience de l’araignée à l’affût, jusqu’à ce que les mortels éphémères de l’Empire l’aient oublié et que l’existence de la dynastie von Carstein ait glissé dans le domaine du mythe.

Quatre siècles se sont écoulés depuis que les hommes et les Nains se furent alliés pour mettre fin aux Guerres Vampiriques. Mannfred a employé les décennies qu’il a passées dans l’ombre à approfondir sa connaissance de la non-vie et des énergies qui la soutiennent, assemblant petit à petit les pièces nécessaires à la réalisation de son ambition ultime. Sa quête est particulièrement sinistre : offrir la non-vie au monde entier, en faire une nécropole universelle où toutes les choses vivantes sont des automates décérébrés au service de quelques élus.

Le projet de Mannfred débute avec la scission de la Sylvanie - processus qui est déjà bien engagé. Usant de chaque once de puissance magique à sa disposition, il a accompli un rituel tiré de l’un des neuf célèbres Livres de Nagash, afin de donner naissance aux Ténèbres Insondables. Il s’agit de la première phase de la fondation de son propre morne empire, un domaine qui lui appartient de droit et sur lequel il régnera sans partage.

Les von Carstein ont longtemps revendiqué le trône impérial. Vlad était un comte du Stirland et jouissait donc d’un grand pouvoir politique pendant ses jeunes années. Mannfred, en tant que dernier descendant de Vlad, considère que sa souveraineté sur la Sylvanie est légitime. Quoi qu’il en soit, le détournement de cette province de la domination de l’Empire n’est que la première étape de son plan, un écran de fumée masquant son objectif véritable jusqu’à son accomplissement.

Le puissant rituel ténébreux de Mannfred a poussé les champions de la lumière à réagir avec force, tout comme le Vampire l’avait prévu. L’armée qui traverse les marches de la Sylvanie a prouvé sa compétence, usant du marteau et du canon pour tout écraser sur son passage. Peu des soldats de l’Empire ont conscience du péril, encore moins de l’ampleur de leur rôle dans le grand plan du génie vampirique.

Quatre siècles de machinations portent progressivement leurs fruits et Mannfred entend bien être là pour les cueillir.

Le Concile des Lames

La traque de von Korden et l’intervention à point nommé des hommes de Volkmar ont amené la croisade devant les murs de Swartzhafen. Mannfred lui-même s’est avancé pour l’arrêter.

Bien que les croisés forcent le passage au travers des barricades des Morts-Vivants, ils sont peu à peu encerclés par les défenseurs décérébrés de Swartzhafen. Les soldats de l’Empire n’ont d’autre choix que de lutter épaule contre épaule, afin de vendre chèrement leur peau comme les ténèbres se resserrent.

Pendant ce temps, des alliés inattendus livrent leur propre bataille de l’autre côté de la vallée…

Les Seigneurs Lumineux

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L’Ordre Lumineux
L’Heliobolis de Templehof de l’Ordre Lumineux
Le Collège Lumineux est peut-être le plus singulier des Collèges de Magie. De fait, pour canaliser l’énergie du Vent de Hysh, dont le comportement est très capricieux, des cabales d’acolytes combinent leurs pouvoirs au cours de rituels méthodiques. Pour correctement canalisés, les sorciers de l’Ordre Lumineux peuvent manifester des piliers de feu à la blancheur aveuglante ou des rayons d’énergie pure qui peuvent bannir les êtres surnaturels jusque dans un autre plan d’existence.

Quand une cabale de sorciers de l’Ordre Lumineux élut domicile à Templehof, les Bourgeois se montrèrent soupçonneux et hostiles. Mais les sorciers, qui n’étaient pas avares de leur or, finirent par être tolérés tant qu’ils restaient à l’écart des « honnêtes gens ».

Depuis une démonstration brûlante des talents de la cabale lors des attaques de Goules en 2521, les citadins se sont pris d’affection pour les membres de l’Ordre Lumineux, qu’ils appellent « Sorciers Blancs » et à qui ils apportent du brouet de lièvre aux navets pour le souper, jusqu’à leur manoir perché.

Officiellement, l’Ordre Lumineux a établi un collegium rural en Sylvanie, car sa magie est la plus adaptée à la lutte contre les Morts-Vivants. Cela fut prouvé à maintes reprises depuis l’avènement des Ténèbres Insondables. Seul le bourgmestre, Vancel von Templehof, soupçonne une arrière-pensée. En effet, sa commune n’est qu’à quelques jours de marche des désolations de Mordheim, et à en croire les chasseurs de primes de la vallée, les rues de la cité des damnés recèlent encore des fragments d’un étrange minéral que les mages convoitent plus que l’or.

Le projet de Mannfred, consistant à faire de la Sylvanie son royaume de la non-vie, est mis en péril par les croisés qui marchent sur ses terres. Mannfred est intervenu en personne pour les éloigner de son arme secrète cachée, un artefact effroyable qui entretient sa malédiction sur la Sylvanie. Le savoir qui a rendu possible cet objet ignoble a été glané dans le huitième Livre de Nagash, rien de moins.

Dissimulé dans les tréfonds de la Vargravie, hors de vue des mortels, le reliquaire est sous la garde des plus puissants spectres de Sylvanie. Il faudrait être fou ou inconscient pour aller risquer son âme par-delà les frontières de la Vargravie, mais les circonstances désespérées nécessitent des mesures qui le sont tout autant. Et le versant oriental du Vallon Ténébreux recèle ses propres héros inattendus…

Émis depuis le sémaphore de bronze des ruines de Konigstein, le message de von Korden avait atteint sa destination. La magie qui imprègne les sémaphores squelettiques est particulièrement faible en Sylvanie, où les tours de guet impériales sont fréquemment à l’abandon. Néanmoins, quiconque possède le don de double vue peut déceler les moindres mouvements dans l’éther. Ainsi, la nuit où le Répurgateur lança son signal de détresse, un trio d’étranges sorciers en aperçut la lueur magique depuis la ville de Templehof, de l’autre côté du grand cirque montagneux que forme le vallon.

Le primat du collegium de Templehof, Jovi Héliomant, avait toujours eu pour obsession la maîtrise de la lumière. Il ordonna qu’on monte les plus puissants télescopes sur le toit de sa tour, pour mieux observer le signal scintillant. En moins d’une heure, il conclut avec certitude qu’il s’agissait de symboles projetés dans les airs.

Les sorciers apprécient les énigmes, tout particulièrement les sorciers de l’Ordre Lumineux, pour qui le savoir et la vérité sont aussi vitaux que l’air et l’eau. Avant l’aube, les signaux avaient été décryptés et retranscrits mot pour mot. Ils disaient que Mannfred était aussi actif que dangereux et que le culte de Sigmar était venu en force pour l’abattre. Or, pour cela, il lui faudrait impérativement de l’aide, et au plus vite.

Héliomant identifia le sceau personnel de von Korden à la fin du message, un grand cercle de flammes représentant les bûchers sur lesquels le Répurgateur immolait les impies. Le Sorcier Lumineux s’était attendu à une telle intervention depuis que les Ténèbres Insondables s’étaient abattues sur la province. Il était grandement soulagé de constater qu’il n’était pas seul à lutter contre la malédiction. En effet, ses propres tentatives de dissiper les ténèbres avec des contre-rituels et la magie lumineuse avaient été vaines.

Héliomant était persuadé de pouvoir appeler toute l’assistance possible au moyen de ses propres signaux, en relayant le message de von Korden jusqu’aux Collèges de Magie d’Altdorf à l’aide de Hysh, le vent lumineux. Si le Patriarche Suprême Balthasar Gelt pouvait être informé directement du malheur qui frappait la Sylvanie, il resterait un espoir à la province sinistrée.

La cabale du collegium était fière de posséder un Heliobolis de bonne taille, que Jovi Héliomant avait, dans sa jeunesse, entièrement fabriqué de ses mains, de la première roue à la dernière lentille. Cette machine de guerre par destination pouvait également servir à transmettre un signal. Les sorciers blancs se précipitèrent vers la remise derrière le collegium, Jovi arrivant en tête malgré son âge. Tout en parlant avec agitation dans le jargon obscur de leur ordre, ils sortirent l’Heliobolis, l’attelèrent puis retirèrent les bâches et réglèrent les lentilles alors même que l’engin commençait à négocier la route.

Après quelques heures d’incantations, l’Heliobolis canalisa le Vent de Hysh à travers ses étranges lentilles teintées et émit un rayon de lumière hésitant. Les sorciers qui en seraient témoins verraient en ce faisceau intermittent un message de la plus haute importance, mais pour autrui il ne ressemblerait qu’à une lueur d’orage anodine. Or, malgré tous leurs efforts, le faisceau et son message ne portèrent pas loin. Depuis leur point de vue perché sur le pic de Templehof, les Sorciers Lumineux purent constater que leur message ne parvenait à franchir qu’une poignée de lieues avant d’être avalé par les Ténèbres Insondables.

Jovi Héliomant soupçonnait que ce phénomène de dissipation de magie n’avait rien de fortuit. En effet, Mannfred avait tout fait pour couper la Sylvanie du reste de l’Empire et aucun mortel ne pouvait espérer égaler sa maîtrise des Vents de Magie, fruit de siècles d’étude.

Les Sorciers Lumineux s’entretinrent longuement cette nuit-là. Le message devait être envoyé à tout prix, faute de quoi les héros du culte de Sigmar iraient à leur perte, ce qui porterait un rude coup à l’Empire. Il fallait des lentilles plus puissantes. Fouillant dans ses souvenirs, Héliomant se souvint de l’observatoire d’un astromancien en haut d’une colline du royaume hanté de Vargravie. Il était depuis longtemps désaffecté, mais Héliomant savait qu’il s’y trouvait jadis un assortiment de lentilles conséquent. S’il était possible de parvenir à ce site et de focaliser la faible lumière du jour sylvanien à travers lesdites lentilles et l’Heliobolis, il serait possible de renforcer le signal émis assez longtemps pour délivrer le message.

Aucun des érudits présents n’évoqua leur pensée commune : ils avaient très peu de chances de survivre suffisamment longtemps en Vargravie. Mais ils étaient décidés à parvenir à leurs fins et ils entamèrent sans délai leurs préparatifs.




Jovi Héliomant
Jovi Héliomant
Le plus expérimenté des Sorciers Blancs est Jovi Héliomant, un érudit excentrique qui est au comble de la joie lorsque son crâne chauve baigne dans la lumière du jour. Il va sans dire que les ténèbres omniprésentes qui recouvrent la Sylvanie le poussent à redoubler d’efforts pour faire revenir le soleil.

Héliomant accepta de bonne grâce son affectation en Sylvanie. À ses yeux, les Morts-Vivants sont étrangement fascinants. Il lui est déjà arrivé de reporter la destruction d’un cadavre animé rien que pour prendre le temps d’observer dans quelle direction il allait tituber. En outre, les ruines voisines de Mordheim lui ont permis d’accomplir des expériences avec une matière de sa création, qu’il a baptisée verre enchanté. Le savant a depuis longtemps perdu toute pilosité suite à ses expérimentations avec ce puissant cristal, mais il poursuit ses recherches sans relâche.

Depuis un voyage de jeunesse dans les cités en ruine de Nehekhara, Héliomant est fasciné par les mécanismes qui régissent la lumière, magique ou non. Il maîtrise mieux que quiconque la fabrication des lentilles et il sait canaliser le Vent de Hysh avec une précision telle qu’on le dit capable de vaporiser un moustique au milieu d’une nuée.

Héliomant a bâti de toutes pièces l’Heliobolis de Templehof dans son atelier, mais l’engin était si imposant que pour l’en sortir, ses acolytes ont dû le démonter pour le remonter dans la cour. Ses excentricités ne sont pas gratuites : c’est au cours des recherches qu’il menait au pays des morts qu’Héliomant découvrit une série de cadavres exsangues suggérant que la menace vampirique n’appartenait nullement au passé.


La Vargravie Hantée

Les Vengeurs du Stirland

L’écrasante majorité des Stirlanders assez audacieux pour venir s’établir en Sylvanie profonde a fini par remballer ses maigres biens pour fuir vers des pâturages plus sûrs. Cependant, certains continuent à se battre bec et ongles pour le territoire dont ils se considèrent les occupants légitimes. Après avoir gagné leur subsistance et bâti leur vie dans une des régions les plus hostiles de l’Empire, ils répugnent à abandonner leur terre.

Ainsi se forment des milices dont les Vengeurs du Stirland sont l’archétype. Ces combattants hirsutes et malodorants forment une confrérie hétérogène d’hommes amers et résolus, rarement à jeun et toujours prêts à se battre. Tous ont perdu leur foyer ou leurs proches à cause de la malédiction dont souffre la Sylvanie.

C’est bien trop d’honneur que de qualifier de Franche Compagnie ce ramassis de vauriens, dont la cohésion militaire est aussi mauvaise que l’hygiène corporelle. Pourtant, leur détermination en fait de rudes combattants, ratissant l’est du Vallon Ténébreux pour abattre tous les cadavres et squelettes errants qu’ils trouvent. Ils ne s’interrompent dans leur mission que pour piller les auberges et les halles abandonnées, jadis grouillantes de vie.

Les Vengeurs du Stirland n’ont plus rien à perdre et se plongent à corps perdu dans leur quête de revanche. Peu importe si cela leur coûte la vie, ou ce qu’il en reste.

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Aucun mortel sain d’esprit ne s’aventure dans la nécropole qu’on appelle Vargravie, nichée dans les montagnes au sud-ouest de Templehof. Elle est si ancienne que ses monuments sont antérieurs à l’époque de Sigmar et, peut-être même, à l’apparition de l’humanité. On raconte que chaque homme, femme et enfant pourrait y trouver une pierre tombale à son nom et que l’astromancien qui y vécut fini par s’enterrer vivant. Sur la frontière dansent des lueurs spectrales qui s’agrègent et se muent en spectres avides dès qu’un voyageur s’approche de trop.

C’est la réputation funeste de la Vargravie, autant que la puissance de ses abominables habitants, qui incitèrent Mannfred von Carstein à en faire sa base secrète. Les Comtes Vampires ne craignent nullement les esprits des morts, car ils commandent aux êtres de la nuit mineurs aussi aisément qu’un homme commande à un animal de garde. Sachant que le peuple de Sylvanie évite la Vargravie comme la peste, c’est au cœur de cette contrée que von Carstein a caché son arme la plus puissante à laquelle il a lié les fantômes locaux. Le moindre intrus est assailli par des ectoplasmes qui ne craignent ni l’épée ni le marteau, mais dont les serres glaciales peuvent dérober la vie.

Une Nuit au Bouc Ivre

On peut dire sans exagérer qu’à la cabale de Templehof, les acolytes de Jovi Héliomant n’étaient pas follement motivés par le projet de s’aventurer en pleine Vargravie, surtout pour y retrouver un observatoire presque oublié. Mais l’enthousiasme débridé de leur aîné finit par s’étendre à ses deux disciples et tous firent leurs bagages pour prendre la route.

Au fond de leur cœur, Neftep et Khalep n’avaient aucune envie d’attendre passivement que le soleil disparaisse pour de bon. À leur grande déception, cela faisait des jours qu’on ne leur avait plus livré la soupe et il n’y avait plus grand signe d’activité dans le voisinage. Les acolytes se disaient qu’à tout prendre, s’il fallait se rendre en Vargravie, mieux valait le faire pendant qu’il restait un semblant de lumière du jour.

Moins d’une journée après leur tentative malheureuse de transmettre le signal à travers la pénombre sylvanienne, les trois sorciers avaient pris place à bord de l’Heliobolis de Templehof et s’étaient lancés sur les routes boueuses menant au sud du vallon. Quand leur étrange équipage brinquebalant traversa la grand-place de la bourgade en cliquetant sur les pavés, il n’y eut pas même un seul gamin pour le regarder passer. Il n’y avait d’ailleurs pas la moindre circulation ; même si les sorciers ne désiraient pas l’admettre, la Sylvanie semblait déjà morte.

Le visage figé dans une expression inhabituellement sombre, Jovi Héliomant fouetta les chevaux de l’Heliobolis, le regard rivé sur les montagnes dans le lointain. C’était leur devoir le plus élémentaire, disait-il, que de tenter d’abolir la malédiction ; les forces de la lumière ne pouvaient tout simplement pas laisser le mal remporter une victoire sans même combattre.

La cabale se sentit d’humeur moins maussade à la vue d’une grande auberge au bord de la route : le Bouc Ivre. Le lieu était apprécié par les patrouilleurs comme par les bandits de grand chemin, en tant que refuge pour les vivants quand les morts partaient en vadrouille. Le tenancier, Bors Attrape-rat, avait visiblement laissés ses lanternes allumées avant de fuir - derrière chaque fenêtre ou presque il y avait une lumière dorée.

En poussant la porte de l’auberge, les Sorciers Blancs se retrouvèrent face à une forêt de lames disparates. Une arbalète se détendit d’un bruit sec et le carreau se planta dans l’encadrement de la porte tout près de la tête d’Héliomant. Après un moment de flottement, les occupants poussèrent un rugissement joyeux : leurs étranges visiteurs étaient bien vivants, tout comme eux.

La cabale tremblante fut tirée à l’intérieur et gratifiée de chopes de bière ambrée. Les bruyants consommateurs étaient tout ce qu’il restait de la population à l’est du vallon. Au cours de la festivité nocturne, les clients et les savants se prêtèrent des serments d’assistance mutuelle bien arrosés. Les derniers habitants de Sylvanie étaient unanimes : ils allaient rendre coup pour coup aux forces maléfiques qui infestaient leurs foyers.


Nell la Susurrante
Nell la Susurrante
En Sylvanie, les parents fatigués racontent des histoires de femmes hurlantes qui emportent dans leur tombe l’âme des enfants bruyants. Pire encore est l’histoire de la plus fameuse gardienne de Vargravie, que les pilleurs des tombes appellent Nell la Susurrante.

« Nell » est une déformation du nom de la comtesse Emmanuelle von Templehof, cousine de Konrad le Sanglant et maîtresse du château Templehof. Jadis, Konrad lui donna un antique grimoire de Nehekhara, en lui confiant qu’il n’était pas instruit en matière de Nécromancie. Or, il ne fit pas mention du prix qui était attaché au livre. Depuis longtemps, les Nains de Zhufbar recherchaient le grimoire dans le but de le détruire car, d’après leurs légendes, il pouvait faire disparaître la lumière du soleil à tout jamais.

Quand les Nains assiégèrent le château Templehof, Emmanuelle leva contre eux une légion de Morts-Vivants. Le livre contenait des sorts de ténèbres qui firent du siège une bataille d’attrition particulièrement sanglante. En moins d’une lune, la comtesse avait la mort de mille Nains sur la conscience. Elle reçut le sobriquet de Mort Susurrante car, chaque fois que, dans le noir, sa voix sifflante appelait un Nain par son nom, il tombait raide mort. Poussés par le désespoir, les Nains prirent d’assaut le château et abattirent Emmanuelle dans son cercueil, au prix de lourdes pertes. Aujourd’hui encore, elle a son nom dans le Livre des Rancunes.

Les dernières décennies ont vu disparaître les runes naines qui réduisaient l’esprit d’Emmanuelle au silence. Elle aurait été aperçue pour la dernière fois aux abords de la Vargravie, où elle incitait les voyageurs à s’approcher davantage. Jusqu’ici, personne ne s’est encore montré suffisamment stupide.

Au Cœur des Ténèbres

Les Livres de Nagash

Quand ils sont certains qu’aucun Répurgateur ne peut les entendre, les sorciers et autres chercheurs des arcanes parlent à mots couverts des Neuf Livres Noirs de Nagash. Certains n’appartiennent plus qu’à la légende ; d’autres sont jalousement gardés par les seigneurs Morts-Vivants ou cachés dans des cryptes secrètes aux gardiens surnaturels. On ignore au juste combien il en reste, mais la rumeur veut qu’il y en ait encore qui circulent parmi l’aristocratie de la nuit. Chaque tome est rédigé sur du parchemin d’origine humaine, enluminé avec du sang nehekharien et contient des malédictions assez puissantes pour renverser un empire, si telle est la volonté du lecteur. C’est grâce à l’un de ces livres que le comte Vlad von Carstein releva des cadavres pourrissants dans toute une province, afin de les envoyer contre l’Empire lors des Guerres Vampiriques.

Un autre de ces volumes blasphématoires, censé être le huitième, entra en possession de Mannfred quand ses laquais nécrophages brisèrent les runes qui isolaient le château Templehof. En explorant les cryptes, il découvrit le grimoire dans un compartiment secret sous le cercueil couvert de cendres de la comtesse Emmanuelle et le prit sans égard pour ses sifflements de protestation. C’est dans ces pages impies que Mannfred apprit à déclencher les Ténèbres Insondables qui sapent graduellement toute vie en Sylvanie. Alimenté par les courants maléfiques de Vargravie, le grimoire demeure l’élément clé du dessein de Mannfred. En plus de plonger toute la province dans la nuit, l’énergie négative des sorts immondes qui hantent ses pages éteint les pouvoirs magiques des mages de moindre envergure comme des chandelles sous la grêle.

Le lendemain, on pouvait à peine discerner le jour ; c’était tout au plus une atténuation de la nuit, un outrage à l’aurore. En se levant, les Sorciers Blancs découvrirent que la moitié de leurs compagnons de beuverie avait reconsidéré leur serment de la veille et disparu sans laisser de traces. Il ne restait que les plus endurcis, qui mâchonnaient des salaisons en soignant leur gueule de bois avec ce qu’il restait de bière dans le cellier du Bouc Ivre. Ces hommes, qui étaient deux douzaines en tout et pour tout, s’étaient donné le nom de Vengeurs du Stirland. Ils déposèrent l’enseigne de l’auberge sur le bar et tous y apposèrent leur marque en signe d’engagement, en faisant signe aux Sorciers Blancs de les imiter. Héliomant approuva d’un air grave, signa l’enseigne d’un geste solennel et ses acolytes firent de même. Dans l’heure qui suivit, la cabale avait repris la route de Vargravie, mais cette fois escortée par les miliciens qui progressaient en éclaireurs devant elle.

Cette étrange alliance ne croisa pas âme qui vive au cours de son périple entier entre le vallon et les montagnes. Avant la fin de la journée, les sommets calcaires de la Vargravie, érodés par le temps, furent enfin visibles. Les seuls détails perceptibles sur leurs pentes étaient les innombrables niches funéraires et les sépultures érodées d’une civilisation qui avait sombré dans l’oubli. Des feux follets verdâtres dansaient à la périphérie du champ de vision des voyageurs. Craignant le pire, Héliomant ordonna de déployer les lentilles de l’Heliobolis en configuration militaire. Sous sa direction, les acolytes entamèrent le rite de canalisation de Solheim.

Alors que les sorciers, les yeux révulsés, adressaient aux cieux les chants et les répons de leur rituel, des spectres cadavériques prirent forme à moins de trente pas de leur escorte. Ils glissaient avec fluidité parmi les tombes anonymes, en laissant une traînée ectoplasmique et se jetèrent sur les intrus avec leurs serres noires. Les miliciens du Stirland frappaient et taillaient de toute la force de leurs bras noueux, mais leurs coups ne faisaient que traverser les apparitions. En retour, les esprits plongeaient les griffes dans leur poitrine et leur broyaient le cœur. Les spectres montaient du sol de plus en plus nombreux et s’agglutinaient jusqu’à couper toute retraite aux miliciens.

Soudain, l’Heliobolis fut pris de violentes secousses. Les miliciens restants, prévenus par leurs alliés, se couvrirent les yeux et se mirent à genoux. À l’instant qui suivit, un faisceau d’intense lumière magique jaillit des lentilles de l’étrange machine. Incapable de contenir sa joie, Héliomant actionna les leviers de l’engin pour balayer tout le périmètre avec son feu mystique. Il volatilisa d’un seul coup les apparitions gémissantes qui encerclaient les miliciens, sans brûler le moindre cheveu gras de ces derniers. Les acolytes du sorcier lumineux applaudirent poliment et les francs compagnons se relevèrent dans un murmure approbateur.

Ce spectacle se reproduisit à plusieurs occasions au cours du voyage, à mesure que l’expédition s’enfonçait en Vargravie. Pour effrayants qu’ils fussent, les fantômes qui protégeaient le royaume contre les intrus étaient parfaitement impuissants face à l’Heliobolis de Templehof.

Au fil de leur progression dans la nécropole, les explorateurs pouvaient presque toucher du doigt le mal ambiant. Le sol était fait d’un amas d’épaisses veines noires qui engourdissaient la chair, même à travers la semelle d’une botte. Sous le coup d’une peur croissante, Jovi Héliomant était sur le point d’ordonner la retraite quand apparut dans la pénombre la silhouette caractéristique d’un ancien observatoire. C’était la première fois qu’il voyait en ce lieu un bâtiment de construction humaine qui n’ait pas été réduit à l’état de ruines par le passage des siècles. Au-delà, dans une cour, se trouvait un étrange assemblage de fer et d’os, chargé de tant de malfaisance qu’on avait peine à le regarder. Il s’y trouvait enchâssé un lutrin, sur lequel se trouvait un grimoire crépitant d’éclairs magiques. Un reliquaire impie, pensa Héliomant, et très puissant, à en juger par les cavaliers fantomatiques et les orphelins hurlants qui l’entouraient. Leurs insoutenables plaintes torturaient l’âme du sorcier comme des éclats de verre plantés dans la chair. Cet assemblage noirci abritait une chose si maléfique qu’elle tourmentait même ceux qui avaient donné leur vie pour la protéger.

L’expédition de Templehof était arrivée à destination et, du même coup, elle avait découvert fortuitement l’épicentre du malaise qui affligeait la province. S’ils parvenaient à détruire le reliquaire, les Sorciers Blancs porteraient un rude coup aux forces de la non-vie. Et même dans le cas contraire, il serait au moins possible d’envoyer un message à ce sujet grâce aux installations de l’observatoire, pour que d’autres reprennent le combat. Tout au moins, on connaîtrait désormais l’origine de l’emprise de Mannfred von Carstein sur la Sylvanie.


La Griffe de Nagash
La Griffe de Nagash
Il y a bien longtemps, la civilisation de Nehekhara fut victime d’un conflit entre les vivants et les morts. Le Haut Prêtre Nagash tentait d’asservir cette antique nation avec les pouvoirs de la non-vie qu’il avait exhumés, mais les prêtres rois le défièrent, unis par le roi Alcadizaar. Nagash devenait de plus en plus monstrueux, car la Magie Noire qu’il étudiait altérait aussi bien son esprit que son corps, et il nomma à la tête de ses armées les Vampires que la corruption de ses arts mystiques venait d’engendrer.

La guerre fit rage une décennie durant, jusqu’à ce que Nagash brise le statu quo en déclenchant une épidémie terrible qui contamina les déserts et fit des millions de victimes. Vaincu, Alcadizaar fut couvert de chaînes et emmené à Nagashizzar. Au moment où l’Archi-nécromant s’apprêtait à mobiliser la magie de ses neuf livres et à faire du monde entier une nécropole, Alcadizzar fut libéré par de mystérieux alliés pareils à des rats. Il se fraya un chemin jusqu’à la salle du trône, où il abattit Nagash, lui coupant une main au passage. L’Archi-nécromant vaincu perdit tout contrôle sur son rituel, dont l’énergie ressuscita les monarques momifiés que recelaient chaque cité et chaque tombeau du royaume aride.

Quant à la main de Nagash, la légende dit qu’elle a rampé hors de la salle du trône comme une hideuse araignée. Ce sinistre artéfact réapparut au fil des siècles dans les histoires des ménestrels, mais quasiment personne ne se doute qu’il existe encore. Seul Mannfred et ses alliés les plus fiables savent que le membre légendaire est bien réel et qu’il contient encore une portion conséquente de la puissance de Nagash. Cette griffe se trouve dans un énorme reliquaire de fer et d’os, au sein des mausolées immémoriaux de Vargravie, là où les mortels n’osent s’aventurer.

La Nécropole Cachée

Les Sorciers Blancs, escortés par les derniers hommes de Sylvanie, espèrent informer les Collèges de Magie de leur découverte. Pour envoyer leur message, il faut amener l’Héliobolis de Templehof au point culminant de la Vargavie, et en outre renforcer ses optiques de verre enchanté avec le télescope d’astromancien qui domine un observatoire abandonné. Héliomant tient captif dans un prisme, un éfrit de lumière arabien capable d’orienter le télescope de sort à envoyer le message, pour peu que l’Héliobolis puisse être positionné directement à proximité du firmament. Ils auront la surprise de tomber sur la Griffe de Nagash elle-même et sur ses gardiens impies…

À l’insu des Sorciers Blancs, leur intrusion au cœur de la Vargravie est survenue au moment opportun. Alors qu’il est sur le point de remporter la victoire à l’ouest du Vallon, Mannfred von Carstein découvre que son secret le plus important a été percé à jour…

Une Lueur dans la Nuit

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Les Cavaliers de la Drakwald
Les Cavaliers de la Drakwald
Le contingent de cavalerie baptisé les Cavaliers de la Drakwald est célèbre pour ses charges tonitruantes. Deux étés plus tôt, il a brisé les reins de la Waaagh! Hachenoire après l’avoir contournée en traversant un gué caché : les destriers et les Demigriffons ont porté les chevaliers à travers les bandes de peaux-vertes, jusqu’à ce que la moité de la horde tourne les talons et soit fauchée dans sa fuite.

Les Cavaliers de la Drakwald sont menés par les Griffonniers Royaux d’Altdorf, l’élite de leur ordre. Lors de leur création, ces vétérans chevauchant des Demigriffons étaient plusieurs douzaines, mais ils ont subi de lourdes pertes lors de l’extermination des tribus d’Hommes-Bêtes aux environs de la route de la Drakwald. Lorsque Karl Franz a reçu la demande de renforts de von Korden, il ne restait plus que trois Griffonniers, pourtant il leur a ordonné de rejoindre les survivants de la croisade de Volkmar. En dépit de leur nombre, les féroces montures et les longues lances des chevaliers leur donnent un avantage considérable contre les Morts-Vivants.

En plus des Griffoniers, les Cavaliers de la Drakwald comprennent aussi un détachement de la Reikguard à l’histoire glorieuse. Ces chevaliers sachant manier la lance avec talent s’entraînent longuement lors de tournois et à la chasse avant de se rendre au combat. On raconte qu’un guerrier de la Reikguard peut transpercer une carte à jouer avec sa lance alors qu’il est lancé en plein galop, même si leurs rivaux ternissent cette réputation en prétendant qu’elle est due davantage à la richesse de l’ordre plutôt qu’à ses réelles compétences martiales.

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Alors que les croisées de Volkmar sur le point d’être vaincus par les Morts-Vivants à Swartzhafen, un cri surnaturel résonne dans la vallée depuis Vargravie. Mannfred fait volte-face et quitte le champ de bataille, laissant derrière lui des centaines de Morts-Vivants s’écrouler au sol tels des pantins désarticulés.

Les croisés saisissent cette opportunité, car Volkmar s’empresse d’inverser la vapeur : la chance lui sourit, d’autant que des renforts, sous la forme des Cavaliers de la Drakwald, arrivent par la route de l’ouest, suivis de près par une étrange machine envoyée par l’Empereur.

Les croisés se préparent à repousser Mannfred dans son antre, le château Sternieste, d’autant plus que les Cavaliers de la Drakwald ne sont pas les seuls à porter le fer au Comte Vampire. En effet, les Sorciers Blancs de Templehof les accompagnent. La bataille prend un nouveau tournant au pied des murs du château Sternieste. Néanmoins, à l’insu de Volkmar, Mannfred a lui aussi fait appel à des renforts…

Alors que les Sorciers Blancs s’aventuraient dans la Vargravie depuis l’est de la vallée, les croisés de Volkmar enfonçaient les lignes de Mannfred. Les troupes de l’Empire se battaient comme des lions, toutefois le nombre des séides de Mannfred semblait inépuisable. La colère de Volkmar le poussait à se jeter dans la mêlée ; les roues grinçantes de son Autel de Guerre broyaient les Morts-Vivants et ne laissaient derrière elles qu’une boue ensanglantée où baignaient des membres brisés. À l’extérieur des murs de Swartzhafen, les flancs de l’armée de Morts-Vivants menaçaient de se refermer sur les croisés tels les mâchoires d’une bête géante. L’Autel de Guerre était coupé du reste de l’armée, incapable de faire marche arrière ou de pousser plus avant à cause de la masse grouillante de cadavres qui se pressait autour de lui. Mannfred s’approcha jusqu’à se trouver à quelques coudées à peine du Grand Théogoniste. Le Vampire restait aussi silencieux que la mort tandis que Volkmar l’invectivait depuis sa chaire. Soudain un hurlement se fit entendre de l’autre côté de la vallée, un son si horrible qu’aucune gorge mortelle n’aurait pu l’émettre. Mannfred gronda de frustration et fit faire volte-face à son destrier squelettique avant de disparaître dans la nuit. Les trois horreurs ailées liées à sa volonté lâchèrent leurs proies et le suivirent dans les ténèbres. Le reste de l’armée de Morts-Vivants marqua le pas tandis que l’influence du Comte Vampire se dissipait lentement. Les uns après les autres, les cadavres ambulants s’écroulèrent.

Le Soleil de Talabheim
Le Soleil de Talabheim
Alors que Karl Franz réfléchissait aux conditions difficiles qui attendait l’armée impériale en Sylvanie, il se souvint de l’expérience tentée par Jurgen Bugelstrauss, un alchimiste de Talabheim légèrement déséquilibré. Sa dernière invention avait été baptisée le Soleil de Talabheim, car elle tirait des roquettes au phosphore qui brûlaient en émettant une lumière intense. En attachant des parachutes en soie à ces projectiles afin de ralentir leur chute, Bugelstrauss avait réussi à illuminer le ciel nocturne de la cité pendant des heures : Karl Franz avait pu apercevoir l’autre rive du fleuve aussi clairement qu’en plein jour.

Malheureusement, l’alchimiste avait connu une triste fin à peine une semaine plus tard lors d’un accident, tandis qu’il manipulait un baril de poudre, une tige de bambou de Cathay de quatre mètres et un sanglier castré mais irascible. Ses créations furent scellées dans des entrepôts de Talabheim le lendemain de ses funérailles, un événement aux répercussions assourdissantes lors duquel pas moins de six Batteries Tonnerre de Feu tirèrent leurs roquettes, et à l’occasion duquel on répertoria trois douzaines d’incendies criminels.

En réponse à l’appel à l’aide de von Korden, Karl Franz ordonna que le Soleil de Talabheim et ses servants soient envoyés au sud par la Vieille Route des Nains aussi tôt que possible. Il commanda aux Cavaliers de Drakwald de retrouver les artilleurs et de les escorter rapidement jusqu’au Vallon Ténébreux : il était persuadé que seule la science avait une chance de prévaloir contre la plus obscure des magies.

Un cri de victoire résonna dans la ligne de bataille des croisés tandis que les soldats s’élançaient et fauchaient leurs ultimes adversaires. La plupart des blessés, trop exténués pour continuer le combat, s’assirent au sol pour panser leurs plaies, mais Volkmar ne comptait pas perdre une telle opportunité. Il ordonna à Kaslain et von Korden de rassembler les survivants, bien décidé à éliminer définitivement la menace du Vampire.

Mannfred était enragé au plus haut point par l’attaque contre son repaire secret de Vargravie alors que sa proie était à portée. Il galopa à toute allure sous la pluie vers l’est de la vallée. Il ne pouvait pas se permettre de perdre son précieux artefact, mais ne voulait pas non plus laisser à Volkmar l’occasion de l’échapper. Même si son destrier Mort-Vivant était capable de traverser la nuit sans laisser de trace, Mannfred prit soin de laisser les empreintes de ses sabots dans le sol, de façon à ce que même le pisteur le moins doué puisse le suivre. Alors qu’il chevauchait, le Vampire invoqua les esprits servants qui protégeaient son reliquaire. Un à un, ils s’agglutinèrent au pied du château Sternieste, sur les collines qui abritaient les tumulus de rois de jadis. Ce n’était pas un hasard si Mannfred avait choisi cet endroit : il savait que son sol lui permettrait de ressusciter une légion de Morts-Vivants. Le Vampire comptait invoquer la Griffe de Nagash, et dans la foulée attirer Volkmar dans un piège.

Alors que les troupes de Volkmar se dirigeaient par la route en direction du château Sternieste, un cri de surprise s’éleva des rangs arrières : un étendard aux couleurs de Karl Franz avait été aperçu à moins d’une lieue. En effet, deux régiments des meilleurs chevaliers de l’Empereur ne tardèrent pas à arriver, le métal des caparaçons des palefrois et des Demigriffons étincelant dans la pénombre. Leur arrière-garde entourait une machine étrange comportant des roues, et de longs cylindres. A n’en pas douter, il s’agissait d’une des mythiques batteries Tonnerre de Feu. Contre toute attente, le message du Répurgateur avait atteint Altdorf et l’Empereur avait envoyé des troupes en renforts depuis la Drakwald. Il ne pouvait pas se passer d’une autre armée, toutefois les régiments qu’il avait choisis avaient été suffisamment rapides pour rejoindre le Grand Théogoniste avant la fin de la bataille.

Ainsi la force de l’Empire qui remontait les collines était plus déterminée que jamais. Chaque homme était prêt à donner sa vie pour s’assurer que le Vampire ne viendrait plus jamais troubler les royaumes des hommes. La fureur de Volkmar s’était muée en une sourde colère. Néanmoins, il avait intégré ces renforts inattendus à son plan de bataille avec efficacité : les soldats devraient retenir les Morts-Vivants. Volkmar ferait de même avec Mannfred afin que la cavalerie puisse porter le coup de grâce.

Alors la brume autour de château Sternieste se dissipait, des ombres s’extirpèrent des tumulus dans un tintement d’armure rouillée. Volkmar fronça les sourcils, car l’apparition de nouveau Morts-Vivants n’était pas de bon augure. Soudain, un rai lumière fendit les ténèbres. Volkmar leva son marteau en s’appuyant sur son pupitre, satisfait de voir que l’Héliobolis de Hysh était toujours opérationnel. Le vieil homme sourit en pensant à la bravoure dont ses troupes avaient fait preuve jusqu’à présent, mais la bataille n’était pas encore terminée…


La Légion Oubliée
La Légion Oubliée
Les tertres et les cairns qui parsèment la Sylvanie sont les vestiges d’un âge de barbarie qui était déjà révolu depuis bien longtemps à la naissance de Sigmar. A cette époque, il était de coutume d’enterrer les morts avec leurs armées, afin qu’ils puissent continuer à guerroyer fièrement dans l’outre-monde. Ces humains ne savaient pas à quel point cette croyance allait se concrétiser des milliers d’années plus tard, sous le règne des von Carstein. Les linteaux de ces tombeaux étaient gravés de runes censées conserver leurs occupants dans le sommeil éternel, mais au fil du temps, ces glyphes se sont érodés, au point qu’aujourd’hui, une simple pleine lune peut tirer les morts de leur torpeur.

La majorité des tombeaux de Sylvanie sont désormais vides, car leurs occupants ont été forcés par des Nécromants de tous poils à quitter leur sépulture. Les guerriers squelettiques qui forment la Légion Oubliée sont toutefois une exception notable. Au cours de leur vie, ils furent les gardes d’honneur de Verek la Lame, le premier châtelain de Sternieste, et le chef de guerre du clan Stern. Dans la non-vie, ils sont liés au château par un pacte magique qui les oblige à le défendre contre tout assaillant. Ni Verek, ni ses guerriers ne pourront quitter la forteresse tant qu’elle tiendra debout. Comme Mannfred le sait, la Légion Oubliée combattra donc sans sourciller quiconque s’approchera de l’ancien bastion avec des intentions belliqueuses. Et c’est précisément ce qui risque de coûter cher à Volkmar et à ses croisés.


La Bataille des Tertres

La croisade est finalement parvenue à acculer Mannfred au pied des murs du château Sternieste. Néanmoins, les soldats de l’Empire ne savent pas que le Vampire les a attirés là délibérément dans le but de célébrer un horrible rituel.

Le Triste Destin de la Sylvanie

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Depuis le retour des survivants de la croisade, la bataille des Tertres est commémorée comme une glorieuse victoire. En réalité, ce fut une bataille désespérée où des centaines d’hommes périrent dans la boue ou transpercés par des lames rouillées.

Les croisés savaient qu’ils tenaient là l’ultime chance d’éviter que la Sylvanie soit définitivement engloutie par les ténèbres. Ils chargèrent les rangs des Morts-Vivants avec l’énergie du désespoir, brisant les cages thoraciques et les crânes dans une frénésie de violence. Mannfred avait prévu une telle obstination de la part des impériaux, et échafaudé son plan en conséquence. En disposant des rangs innombrables de cadavres frais devant sa ligne de bataille, il laissa les humains s’épuiser contre ses poupées de chair, tout en ressuscitant promptement les Morts-Vivants qui tombaient sous leurs coups. Certes, les harangues de Volkmar galvanisaient ses troupes, mais même le Grand Théogoniste sentait la fatigue s’emparer de ses membres.

Ce n’est que lorsque les coups des croisés commencèrent à faiblir que Mannfred engagea ses réserves. Des Revenants et leurs rois lourdement équipés surfirent des tertres de part et d’autre de la ligne de bataille impériale, et se mirent à faucher les rangs humains avec une facilité déconcertante. Pire encore, les croisés morts se relevèrent pour attaquer leurs anciens camarades. Les visages des macchabées étaient tordus dans un rictus macabre tandis qu’ils se jetaient férocement sur les vivants. La ligne de bataille de l’Empire faiblit, au point qu’elle se retrouva à deux doigts de la déroute.

C’est alors qu’une lumière dorée recouvrit le champ de bataille et que le sol s’ouvrit en de multiples endroits. Cette fois, ce ne furent pas les morts qui émergèrent de leurs tombeaux, mais les symboles sacrés que les agents de Mannfred avaient enterrés des mois auparavant dans cette terre maudite. Des marteaux de Sigmar dorés, des totems d’Ulric en argent et même des symboles solaires en bronze de Myrmidia se retrouvèrent suspendus par des fils invisibles au-dessus du champ de bataille. Le message codé envoyé par l’Héliobolis avait atteint le Patriarche Balthasar Gelt en personne : celui-ci avait célébré un rituel pour aider ses alliés.

Ses effets se faisaient sentir à un moment critique et furent spectaculaires. La lumière des symboles sacrés flétrissait les corps des Morts-Vivants ; ceux-ci s’écroulaient dans la boue comme des sacs de vieux os. Les croisés poussèrent des cris de joie, tombèrent sur leurs ultimes adversaires et les taillèrent en pièces. En quelques minutes, la bataille avait définitivement basculé en faveur de l’Empire. Cependant, lorsque les brumes des combats se furent dissipées, il n’y avait aucun signe du Grand Théogoniste Volkmar…


Volkmar avait l’impression que sa tête allait exploser. Il sentait le contact de la pierre froide contre sa joue. Le tumulte de la bataille était étouffé par des murs épais : il se trouvait dans une pièce circulaire éclairée par des chandelles. L’odeur du sang était tenace.

Des cierges énormes formaient un cercle de lumière. Leur suif rosâtre dégoulinait au sol comme des larmes ignobles. Volkmar tressaillit lorsqu’un gros pied griffu apparut dans son champ de vision. Deux Vargheists lui tournaient autour ; ils semblaient prendre soin d’éviter quelque chose gravé sur le sol. Une de ces bêtes était celle qui avait porté le coup l’ayant fait sombrer dans l’inconscience. Volkmar chercha instinctivement son marteau de guerre, sans le trouver, bien évidemment. Patience… se dit-il. Attends le bon moment pour agir…

Il s’aperçut que des sillons dorés creusés dans le sol décrivaient peu ou prou les contours de la Sylvanie. Ils brillaient d’une lueur surnaturelle qui lui fit mal aux yeux. Il parvint à se mettre à genoux malgré sa vision brouillée. Du sang s’écoulait le long des lobes de ses oreilles sur les épaules. Il n’osa pas porter la main à son crâne pour évaluer la gravité de sa blessure, de peur de tâter quelque chose de mou et spongieux.

Des silhouettes étaient enchaînées aux murs tout autour de lui. Certaines avaient le regard vitreux, d’autres paraissaient à peine conscientes. Il reconnut les robes blanches d’un guérisseur de Shallya, un butor barbu portant la marque d’Ulric tatoué sur le front, et un dévot de Mórr qui avait été fouetté si durement qu’il était à genoux dans une mare de son propre sang. Des prêtres… pensa Volkmar. Le chevalier de Myrmidia Lupio Blas, que Volkmar avait cru tué durant la bataille, était enchaîné en face d’une damoiselle Elfe au port si altier que même le sang et la crasse ne parvenait pas à le dissimuler. Une tiare brisée arborant un phénix était encore accrochée à ses tresses défaites. Entre chacun des huit captifs se trouvait un pupitre ayant la forme d’une griffe démoniaque, et sur lequel était posé un épais grimoire fermé par de lourdes chaînes dorées. A quelques pas de Volkmar, le Couronne de Sorcellerie reposait sur un coussin en peau humaine. Les joyaux qui la sertissaient brillaient à la lueur des cierges. Le Grand Théogoniste essayait de prendre conscience de cet environnement malgré son mal de crâne, et ce qu’il découvrait ne le rassurait pas. Parvenir à capturer autant de dignitaires et d’artefacts était le labeur de plusieurs mois, voire de plusieurs années, mais dans quel but cette œuvre avait-elle été accomplie ?

L’ombre d’une seconde, les flammes des cierges vacillèrent, puis Volkmar sentit une botte ferrée appuyer sur sa nuque pour le plaquer au sol.

« Voyez-vous cela ! » s’exclama une voix cultivée à l’accent sylvanien. « Le grand Volkmar, Haut Prêtre de Heldenhammer, se tortillant par terre comme un ver ! On dit que le sang de Sigmar coule dans tes veines, mon ami. Peut-être est-ce la vérité, qui sait ? »

Mannfred von Carstein pensa Volkmar. Sa joue se pressait contre le sol dallé. Il vit un des Vargheists aller d’un captif à l’autre pour leur ouvrir le poignet avec ses dents effilées. Le sang se mit à s’écouler sur les dalles vers les sillons creusés au milieu de la pièce.

Volkmar chassa la douleur de son esprit et pensa à Sigmar, son dieu-guerrier, celui qui avait banni le père des Vampires alors que l’Empire était encore jeune. Il sentit une vague d’énergie nouvelle envahir ses membres engourdis et tenta de se relever en se débarrassant du pied qui pesait entre ses omoplates. Une souffrance atroce s’ensuivit lorsqu’une main griffue le saisit par le crâne et le souleva. La douleur brouillait encore sa vision tandis qu’un visage pâle tordu par un rictus haineux s’approchait du sien. Il serra le poing et frappa Mannfred si fort à la mâchoire qu’il lui déchaussa une dent.

« Malheureusement... » dit nonchalamment le Vampire en crachant une canine avant d’afficher un sourire ensanglanté, « …je crains qu’il soit trop tard pour ce genre de ruade primitive. Non seulement pour toi, mais aussi pour l’Empire tout entier. »

Un vent glacial traversa les meurtrières de la salle et souffla les cierges. Volkmar sentit immédiatement ses muscles et son esprit s’engourdir. Alors que les éléments se déchaînaient, la nuit au-dessus de la salle à ciel ouvert fut voilée par une nuée de fantômes transportant une cage de fer noir aux formes sinistres. Les Vargheists se mirent à hurler de joie et à lever les bras, comme perdus dans une supplication sauvage.

« Le sang de Sigmar ! » s’exclama von Carstein en levant un regard maléfique vers le ciel. « L’ultime ingrédient afin de récupérer le royaume qui me revient de droit. » Le Vampire sourit en se tournant vers ses prisonniers ; Volkmar suivit son regard. « De grandes choses peuvent être accomplies grâce au sang des vrais croyants, » poursuivit Mannfred. « La Sylvanie va devenir une terre où la foi n’aura plus prise, et où tous vos symboles sacrés ne seront plus que des breloques sans pouvoir. Tout cela parce que votre propre sang se sera retourné contre vous. »

Volkmar sentit qu’on le ceinturait, et éprouva une vive douleur au poignet lorsque Mannfred le taillada avec ses griffes. Le Vampire ouvrit les lèvres de la plaie pour forcer le sang à s’écouler. Le liquide carmin dégoulina le long des doigts gourds de Volkmar.

Le Grand Théogoniste observa avec horreur son essence vitale se mêler à celle des autres jusqu’à ce que les sillons dorés s’empourprent totalement. Volkmar tentait de rester conscient alors qu’on le soulevait. Il sentit qu’on le portait jusqu’à une des rares fenêtres de la tour, afin qu’il regarde les montagnes qui ceinturaient la vallée. Il aperçut une lumière rouge qui faisait écho aux contours que les sillons dessinaient sur le sol de la pièce, et dans cette lumière rouge, il distingua des amoncellements d’ossements qui s’élevaient progressivement du sol, jusqu’à former un rempart au niveau des frontières de la Sylvanie.

« Non ! » hurla Volkmar tandis qu’il réalisait enfin de quelle façon le Vampire comptait transformer la province en une forteresse de la non-vie. « Sois maudit ! Je ne vais pas te laisser faire ! »

La vigueur surnaturelle de son dieu l’envahit de nouveau et il repoussa von Carstein avant de tenter de canaliser son pouvoir en une décharge d’énergie.

En vain.

« Je te l’ai déjà dit, c’est trop tard… » le nargua Mannfred d’une voix glaciale. « Aucun mortel ne peut plus me défier. »

La dernière chose que vit Volkmar avant de sombrer dans les ténèbres fut les canines du Vampire qui se rapprochaient de sa gorge.

Source

  • Le Sang de Sigmar, produit par le design studio Games Workshop, 2013