La Princesse d'Argent

En l’an 2293 du Calendrier Impérial, une étrange visiteuse vint à la cour du Wurtbad, capitale du Stirland. Les hérauts la présentèrent comme étant la Princesse Layla de Copher, l’une des quatre grandes cités d’Arabie. Sa silhouette gracile était revêtu de soies noires qui semblaient danser d’une vie propre. Sous un turban de laine cramoisie, un masque d’argent figurant un visage sévère mais beau masquait ses traits. Elle était suivie par des serviteurs au teint olivâtre qui répandaient de l’eau de rose autour d’elle. Des soldats en cottes de mailles noires et plates émaillées, le visage couvert de casques à pointes dont la visière était un masque lisse, marchaient à ses cotés alors qu’elle entrait dans le hall du Comte Edwald.

Le Comte fut abasourdi par la gracieuse apparition et, sans l’ombre d’une hésitation ou d’un doute, la convia à demeurer dans son château. Les deux dinèrent en tête à tête, pendant que les gardes du comte s’étonnaient du silence de la suite de la princesse, dont les membres avaient dédaigné la caserne pour planter des tentes dans la cours d’archerie. Aucun feu ne brûlait dans leur camp, et les sentinelles curieuses notèrent que nul son n’en émanait. Le seul mouvement était celui des soldats qui patrouillaient.

Le matin suivant, le comte Edwald annonça ses fiançailles avec la princesse Layla. Avec ses nouveaux alliés Arabiens, promit-il, il pourrait prendre le trône impérial pour le Stirland. Beaucoup furent ravis d’apprendre cette nouvelle, car le Comte n’avait pas d’héritier, et l’influence du Stirland décroissait. Certains toutefois , n’apprécièrent pas la tournure que prenaient les événements. La principale voix dissidente était celle de Gerhardt, le trésorier du comte. Il avait pris connaissance de la dot exorbitante demandée par les seigneurs Arabiens en échange de leur fille, et soupçonnaient que Layla n’était pas même princesse. Il demanda à ses agents d’espionner la princesse et sa suite.

Des semaines passèrent et Gerhardt ne reçut aucune nouvelle de ses agents. On n’apercevait que rarement Layla, même si le Comte passait le plus clair de son temps avec elle. Gerhardt se mit à craindre que ses hommes n’eussent été tués et se lança en personne dans l’enquête. Une nuit, il posta cinq de ses plus solides guerriers autour des quartiers accordés à la princesse. Puis il emprunta un passage secret que seuls quelques-uns connaissaient pour se rendre dans sa chambre.

Il trouva bien pire qu’une coureuse de dot. Le masque d’argent de Layla était posé sur le lit, son turban sur une commode. À la pâle lueur des bougies, Gerhardt distingua une peau blême et une tête chauve. La princesse était penché sur quelque chose, et à la faveur d’un de ses mouvements, le trésorier se rendit compte qu’il s’agissait d’un de ses agents. Du sang coulait de son cou ouvert, et la soi-disant princesse laissa choir le cadavre. Le trésorier ne put réprimer un hoquet d’horreur et, vive comme un serpent, la princesse fit volte-face. Des canines aussi longues que des doigts dépassaient de sa bouche, et son visage bestial était couvert de cicatrices et de plaies. Sans eau de rose pour la camoufler, une odeur de pourriture régnait dans la pièce. Gerhardt appela ses hommes et s’enfuit dans le passage, alors que la Vampire appelait ses propres guerriers. Leur visage décharné révélé par le clair de lune, des hommes d’armes morts-vivants prirent d’assaut la porte, pendant que Layla écumait l’intérieur du bâtiment. Le Comte put être évacué alors que la bataille faisait rage sur les créneaux et dans la cour. Pendants plusieurs heures, les braves soldats du Stirland luttèrent contre les Guerriers Squelettes. Alors que l’aube commençait à poindre, la Vampire rejoignit ses troupes après avoir étanché sa soif sur des dizaines de soldats et de serviteurs.

L’armée des morts se replia ensuite vers l’est, vers les montagnes, et l’on ne revit plus, ni n’entendit plus parler de la Princesse d’Argent.

Source

• Livre d’Armée des Comtes Vampires, V7