Festus Bonifié, le Jardinier de Nurgle

De La Bibliothèque Impériale
« Bonne maladie à vous ! »

Le docteur Festus était un médecin et un chirurgien fortuné, et considéré comme le meilleur praticien de l’Empire. Il possédait une chaîne d’hospices dans le Nordland, et même une prestigieuse échoppe d’apothicaire à Altdorf même. Même si au cours de sa carrière, il connut plusieurs succès dans le traitement de souches de maladies virulentes, son échec face à la Fièvre Grinçante le conduisit au seuil de la folie, perdu et désespéré parmi les corps de ceux qu’ils ne pouvaient pas sauver. Quand Nurgle lui offrit le savoir encyclopédique de toutes les formes de maladie - y compris la Fièvre Grinçante - le docteur Festus accepta de bonne grâce. Il ne pouvait imaginer la nature du pouvoir avec lequel il traitait, ni le fait que le cadeau de son nouveau maître allait le précipiter dans l’abîme de la démence. Dès lors, la seule motivation de l’apothicaire fut l’obsession d’expérimenter, de mettre en application ses connaissances épidémiologiques et de semer ses graines dans le Vieux Monde et au-delà. Si au passage, il pouvait concevoir des afflictions encore plus insolites, tout était pour le mieux.

L’étrange mission du docteur Festus le conduisit toujours plus au nord dans sa quête d’ingrédients extraordinaires. Les armées barbares de Norsca l’accueillir dans leurs rangs avec un empressement qui frôlait l’adoration, car la forme de l’apothicaire avait été remodelée, et même le plus jeune guerrier savait que le docteur était béni par Nurgle. D’ailleurs, Festus se montrait toujours assez patient pour se faire accepter, car il avait ainsi assez d’assistants pour partir chercher les éléments nécessaires à la préparation de poudre d’os de Cockatrice, de cœur de Mutalithe bouilli, ou de sang distillé d’une douzaine d’Enfants du Chaos afin d’en tirer un élixir proche d’une panacée.

Les tribus qui le suivaient étalent vaguement conscientes du fait que l’apothicaire récoltait des ingrédients pour quelque grand rituel, mais elles en ignoraient le but, et n’en avaient cure. Elles se contentaient des poisons que Festus étalait sur leurs lames et qui mettaient à genoux jusqu’aux Trolls de glace qui attaquaient leurs villages, et de ses potions qui pouvaient ramener un homme du seuil de la mort. Seul Festus connaissait la portée du grand œuvre qu’il était en train d’accomplir.

Lors de l’Hexenacht de 2520, Festus recueillit l’ingrédient le plus hallucinogène de tous : la racine d’une mandragore de cristal, volée au cours d’un cauchemar kaléidoscopique par Eregrest le Géomancien, contre quelques jours de vie supplémentaires. Moins d’un an plus tard, à l’occasion d’une bataille entre armées démoniaques, Festus contamina l’une des damoiselles de Slaanesh avec une affliction défigurante, et échangea l’antidote contre les huiles parfumées qu’elle avait prises dans le boudoir de son maître. Prétendant être un grand dentiste, Festus convainquit le Grand Immonde Ghu’bu’hurgh que toutes ses peines étaient liées à des incisives pourries, et arracha personnellement une douzaine de dents de la mâchoire du Démon. Enfin, après avoir masqué totalement son odeur, Festus se faufila dans le repaire des Goregloutons et dégagea trois crânes d’airain du pilier métallique - au pied duquel ils déposaient leurs offrandes à Khorne. Grâce à ces symboles du triomphe de Nurgle, Festus était plus proche de son but que jamais.

Festus ne visait rien moins que d’ouvrir une faille dans la réalité, un portail si grand que l’essence du Jardin de Nurgle pourrait irriguer le monde mortel. C’était un plan d’une telle ambition que Festus lui-même doutait secrètement d’y parvenir. Toutefois, s’il voulait gagner la faveur de son maître, il devait essayer. Heureusement, un autre serviteur de Nurgle voulait lui aussi voir ce projet réussir. Parfois, les aléas du destin étaient favorables au docteur, au point qu’à certains moments, il aurait pu jurer qu’une main invisible lui facilitait la tâche. Il ne découvrirait la vérité que quelques années plus tard.

Utilisant les égouts pour cacher sa présence, Festus retourna dans sa pharmacie souterraine d’Altdorf pendant l’été 2525. Tous ses précieux ingrédients étaient soigneusement conservés dans le coffre qu’il portait sur son dos. Il se mit au travail sur-le-champ. Les alambics bouillirent, les fioles tintèrent, les sphères de cuivre sifflèrent et des labyrinthes de verre distillèrent les épidémies les plus élaborées de mémoire d’homme. Festus en profita pour parfaire six des sept ingrédients nécessaires pour ouvrir la porte sur le Jardin de Nurgle, et s’assurer ainsi la faveur indéfectible de son maître.

Ce ne fut que lorsque Ku'gath, Père des Épidémies, révéla son implication dans sa quête que Festus réalisa que Nurgle lui-même l’observait. Le jour, les deux apothicaires perfectionnaient le Septième Ingrédient ; la nuit, Festus arpentait les rues d’Altdorf, semant les graines d’un chaos qui porterait bientôt ses fruits. En effet, lors de la Geheimnisnacht de 2525, Festus et Ku’gath ouvrirent la porte donnant sur le jardin de leur maître, et l’irréalité afflua. Le minutage était si précis que le portail s’ouvrit juste au moment où les armées de Nordiques que Ku’gath avaient attirées au cœur de l’Empire se rejoignirent pour fondre sur leur proie. Le monde des hommes vacillait au bord du précipice, et sa ruine n’avait pas été provoquée par le caprice des rois ou des Princes Démons, mais par le labeur d’artisans dévoués. C’était un exploit d’une telle ampleur, que Nurgle récompensa Festus en lui accordant l’immortalité qu’il désirait tant. Il devint un nouvel être, gonflé par la puissance de son maître. Le chirurgien tourmenté, l’apothicaire qui tâtonnait dans des sous-sols humides et avait fait de la prévention de la mort son idée fixe, n’était plus - il était le Jardinier de Nurgle, pour qui faire don de la vie débridée au monde était aussi simple que de respirer.

Source

  • La Fin des Temps - Glottkin