Obscur Baiser

De La Bibliothèque Impériale
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« Ne soyons pas naïfs, ne parlons pas comme si nous nous adressions à des enfants. C’est douloureux. Extrêmement douloureux. La chair se déchire, le sang jaillit, la douleur est si forte que l’on croirait avoir été frappé à la tête et que l’on tombe évanoui. Vous pouvez sentir la fuite de votre propre vie et vous êtes saisi de panique, terrorisé. Mais il est possible de surmonter la panique et la douleur et de les maîtriser. Et puis, dans ce monde, les choses vraiment dignes d’être désirées ne valent-elles pas toutes leur prix de souffrance et d’effort? »
- Lady Ariette von Carstein

La vie d’un Vampire commence dans le sang. Néanmoins, contrairement à ce qu’affirment les mythes populaires il ne suffit pas d’être mordu par un Vampire ni même de se faire saigner à blanc pour être métamorphose en enfant du sang. La transformation n’intervient qu’à l’issue d’un rituel de partage durant lequel les deux individus concernés doivent longuement boire aux veines l’un de l’autre. Ce rituel, appelé l’Obscur Baiser ou Baiser de Sang par les esprits romantiques - mortels ou immortels - n’est pas aussi doux que ce nom pourrait le laisser supposer. Il s’agit d’une action prédatrice, où l’on s’ouvre la gorge pour laisser couler le sang à gros bouillons dans une gorge qui s’en régale. Pourtant, ce nom est bien choisi car il s’agit également d’un acte d’une extrême intimité, considéré par celui qui le donne comme une offrande d’affection profonde. Dans la plupart des cas, celui qui le reçoit le voit également ainsi. Bien qu’ils puissent certainement craindre ce qui les attend au-delà, rares sont ceux qui reçoivent ce don contre leur gré et nul n’éprouve le moindre regret une fois qu’il l’a reçu.

Ceux qui le reçoivent ont vraiment des raisons d’être effrayés, car il s’agit d’une expérience aussi terrifiante qu’exaltante. Le sang brûlant et corrosif des Vampires envahit les veines du sujet, détruisant le faible sang mortel sur son passage. On ignore ce qu’il advient de l’âme et de l’essence humaines au cours de ce processus, tous les Vampires qui ont accepté d’en parler décrivent quelque chose de différent. Certains prêtres émettent l’hypothèse qu’elles entrent dans le Jardin de Mórr mais sont renvoyées par le Dieu parce qu’elles sont des abominations à ses yeux. Des érudits et des Sorciers en parlent parfois comme d’entités flottant entre les royaumes, prises au piège pour l’éternité entre ce monde et l’au-delà. Quelle que puisse être la vérité, chaque Vampire s’éveille animé d’un esprit nouveau. Il conserve les pensées et les souvenirs du mortel qu’il était, mais au fond de son être se tapit une sombre bête qui l’incite à chasser et à tuer, à se délecter de vices infâmes et à se glorifier de ses sinistres appétits. Certains voient cette impulsion sous une forme séparée (la Bête Intérieure) tandis que d’autres considèrent simplement cela comme un bienfait venant de ce qu’ils ne portent plus le fardeau de leur âme.

La nature de la métamorphose fait l’objet de nombreuses controverses chez ceux qui ont le cœur à philosopher, car elle pose une question fondamentale au sujet de la véritable nature de l’homme. En outre, il est indéniable que ces interrogations sont rendues plus obscures encore par le cercle très fermé de ceux qui sont invités à se joindre à la société élitiste des Vampires. Bien que le processus de décision qui conduit chaque Vampire à choisir celui à qui il offrira le don soit totalement individuel, chacun d’eux n’élit que des individus qui feront grand honneur à sa lignée. Les élus sont toujours des mortels aux qualités exceptionnelles, d’une beauté remarquable, à la volonté prodigieuse. Ils sont également quasiment toujours illuminés d’une sorte de sombre lumière, une part d’âme obscure en attente, tapie dans les tréfonds d’eux-mêmes, que peuvent percevoir leurs parents des ténèbres. Même si certains Vampires se montrent moins pointilleux que d’autres (les Stryges ne s’embarrassent pas d’autant de précautions quant à leur progéniture), leur société reste quand même la plus exclusive et la plus fermée du Vieux Monde. C’est pour cela que la mise au monde d’un Vampire n’est jamais envisagée à la légère, frivolement, mais toujours avec prudence, révérence et passion, dans la crainte de devoir réparer de futures erreurs si le choix devait se révéler peu judicieux... car c’est bien souvent le parent qui encourt le blâme pour les péchés de sa progéniture.

Le Tabou Brisé

Une Horreur des Cryptes est une Goule à laquelle un Vampire a offert le Baiser de Sang, un acte véritablement abominable de l’avis de la vaste majorité des Maîtres de la Nuit. Fort heureusement pour les standards de qualité des buveurs de sang, quelque chose dans l’organisme de ces humains maudits les empêche de devenir de véritables Vampires, mais les Horreurs des Cryptes n’en sont pas moins pour autant de véritables monstres.

Les élus sont inévitablement choisis parmi les admirateurs et les sujets que tout Vampire finit toujours par attirer. Les Vampires jouissent d’une immense popularité et d’une réputation considérable. Comment pourrait-il en être autrement ? Ils sont tout ce que les mortels aspirent à être : ce sont des colosses, aussi bien physiquement que mentalement, ils contrôlent des territoires et des hommes, sont des maîtres du savoir et de la sorcellerie, enfin ils sont affranchis des ravages du temps et ne font que grandir en stature à mesure du passage des années. La multitude de mortels qui aspirent à devenir des enfants de la nuit est une autre des raisons pour lesquelles les Vampires se montrent tellement circonspects dans le choix de leurs rejetons : si ce don était facile a obtenir, le monde entier viendrait le leur réclamer à cor et à cri et leurs rangs seraient bientôt encombrés de tous les faibles et les benêts de la terre.

Quelques Vampires, comme les Nécrarques, vivent de manière tellement recluse qu’ils ne peuvent se montrer aussi sélectifs que les autres. Ils accordent alors parfois cet honneur à des membres de leur entourage, serviteurs ou nécromanciens, qui se sont montrés de bons intendants, élèves ou lieutenants. Certains accordent le don aux apprentis qui leur ont démontré un talent exceptionnel et une obsession suffisamment dévorante pour leur domaine de prédilection. D’autres, plus exigeants, peuvent mettre des conditions originales et très particulières à la sélection de leurs candidats. Les Dragons de Sang, par exemple, écument le monde à la recherche des guerriers les plus valeureux, indépendamment de toute considération de classe sociale ou d’origine. Tous ceux qui se montrent à la hauteur de leurs critères (en règle générale, ceux qui sont capables de se défendre contre leurs attaques) sont pris en considération. Néanmoins, tous les Vampires partagent le même préjugé contre les non-humains. Peut-être ne serait-il pas impossible pour un Elfe, un Nain ou un Halfling d’être admis parmi les Vampires, mais on ne connaît pas d’exemple de l’un des fils du sang allant à l’encontre des commandements de leur snobisme invétéré pour se tourner vers les représentants de ces races.


Le Feu et le Sang[modifier]

Le Point de Vue d’un Mortel

Chaque Vampire a d’abord été un humain ordinaire, comme vous et moi. Le processus exact par lequel un mortel est métamorphosé en Vampire nous est inconnu. Chaque érudit propose une explication différente et ils sont nombreux à penser que les victimes des Vampires sont condamnées à rejoindre leurs rangs. Selon l’une des théories les plus crédibles, un échange de sang serait essentiel. Une seule gorgée pourrait suffire ; peut-être y a-t-il de courageux guerriers qui ont été frappés de cette malédiction simplement parce qu’ils avaient combattu l’ennemi la bouche ouverte. On vous accusera peut-être d’être des individus maussades, peu riants, à l’âme austère ; et toutes sortes d’autres choses tout aussi insultantes, mais s’il est prudent, un chasseur de Vampires conserve la bouche fermée quand il traque les Morts-Vivants.

Cependant, il ne s’agit là que d’une théorie. Un certain nombre de cas répertoriés laissent à penser que la métamorphose n’est pas garantie en cas d’ingestion de sang. Après avoir consommé du sang vampirique, l’un de nos frères est simplement mort d’une maladie débilitante et n’est pas revenu de sa tombe pour autant, tandis que d’autres, à ce que l’on dit, se sont montrée suffisamment dévots et robustes pour résister à ces effets et guérir après une période de maladie. Les Morts-Vivants sont retors, il est possible qu’ils saignent leurs victimes à blanc cours de leur rituel, avant de le corrompre à l’aide de sang de Vampire. De cette manière les victimes seraient déjà sous leur influence lorsque le sang impur pénètre dans leur organisme et celui-ci ne contiendrait pas assez d’humeurs pures pour combattre son influence morbide.

Après la contamination, quelle que soit la manière dont elle intervient, vient une période de sueurs froides, de frissons et de maladie qui peut durer d’une journée à une semaine. Après cela, la victime meurt et renaît comme Vampire. Toutefois, ne commettez pas l’erreur de croire qu’il s’agit de la même personne. Si l’un de vos camarades subissait cette transformation, la seule manière de sauver son âme serait de le confier aux Jardins de Mórr en toute hâte.

Un Vampire, même jeune, possède une force prodigieuse, au moins égale celle des mortels les plus forts. Il devient beaucoup plus rapide que du temps de son vivant, à tel point qu’il peut éviter les attaques alors qu’un observateur penserait l’avoir à peine vu bouger. Il ne ressent quasiment pas la douleur et peut résister à des coups qui estropieraient un homme ordinaire. Il devient un seigneur parmi les Morts-Vivants, capable de dominer les morts sans repos les moins puissants par sa simple volonté. De plus, il se voit animé d’une inexplicable soif du sang des vivants. Un Vampire doit se nourrir régulièrement, en règle générale une fois par semaine. Il n’a pas besoin de saigner ses proies à mort, mais la plupart des Vampires nouveau-nés se moquent de laisser la vie sauve à leurs victimes.

Maximillain Sommers, Chevalier du Corbeau
« Il est certain qu’un bon nombre de choses restent inchangées après avoir reçu l’Obscur Baiser : un mortel rencontrant quelqu’un de sa connaissance pourra toujours reconnaître son ami à ses manières, sa mine et ses habitudes, et il verra toujours en lui le reflet de ses pulsions et de ses aspirations. Pourtant ces désirs lui apparaîtront comme vus à travers un sombre prisme, une image obscurcie et dévoyée de ses anciennes manières et habitudes, des pulsions sans frein ni restriction, des songes plus ténébreux que tous ceux qui pourraient visiter l’âme des mortels. Cependant, qui saurait dire si ces ténèbres sont un élément acquis ou si elles sommeillaient déjà dans l’âme du mortel, dans l’attente désespérée de leur libération ? Sommes-nous des mortels qui rêvent qu’ils sont des Vampires ou bien étions-nous déjà des Vampires s’imaginant qu’ils étaient des mortels ? »
- Lord Aristarchus, Philosophe Nécrarque

La métamorphose est rapide. Pendant quelques heures, le Vampire nouveau-né reste affaibli et désorienté, mais cela s’estompe rapidement. Ces sensations sont remplacées par l’exaltation de découvrir une nouvelle vie et l’extase ressentie à la découverte de nouveaux pouvoirs. En quelques instants, à mesure que le sang nouveau prend possession de son corps, le Vampire réalise que ses limitations humaines n’existent plus, qu’elles ont été remplacées par une puissance et une vitalité impies, une force et une rapidité surnaturelles.

Une autre amélioration des plus voluptueuses accompagne l’augmentation de la force et de la rapidité: le nouveau-né acquiert l’instinct du prédateur. Il se retrouve non seulement doté des sens d’une bête de proie, mais devient également capable d’entendre, de flairer et de voir le sang, quel que soit l’endroit où celui-ci se dissimule. Dans une pièce bondée, un Vampire peut entendre le moindre battement de cœur, ressentir la course du sang battant dans les grosses veines jugulaires et sentir l’arôme de la plus petite blessure comme si elle dégageait le fumet d’un bœuf entier rôtissant sur sa broche. Et avec les appétits du prédateur viennent également ses talents. Le Vampire est naturellement expert dans l’art de se déplacer en silence et de se rendre invisible. Sans avoir à y penser, il devient un pisteur hors pair, un chasseur instinctif et un parfait combattant. Les loups n’ont besoin d’aucune instruction pour savoir quand bondir et où plonger leurs crocs : le Vampire est comme eux. Il tue d’instinct, sans réfléchir ni atermoyer, en se délectant de chaque seconde.

Mais ce n’est pas tout. Il y a des choses plus nouvelles et importantes que ces simples modifications physiques. L’esprit est purifié, amélioré. Là où régnait le doute autrefois, la certitude prend le dessus. Où il n’y avait que faiblesse, il y a à présent une puissante résolution. Et la peur de la mort est remplacée par un inébranlable courage. Pour la première fois, le Vampire est véritablement maître de son âme et il peut entrevoir un peu de ce que cela signifie d’être un Dieu. Avec ce contrôle de lui-même lui vient également l’ascendant sur les créatures inférieures : le Vampire est son propre maître et il domine tout ce sur quoi se pose son regard.

Cette flambée de pouvoir et de suprématie se révèle enivrante, parfois irrésistible. Ivres de puissance, de nombreux Vampires se jettent à corps perdu dans la débauche et les excès, se glorifiant de leurs nouvelles forces et de leur domination. Ils massacrent les innocents par dizaines, font un carnage de leurs rivaux, torturent leurs anciens ennemis, brisent tous les tabous et commettent de noires hérésies. Un tel comportement ne tarde pas à leur attirer les attentions des porteurs d’aubépine et d’argent et, dans leur sagesse, leurs parents des ténèbres veillent à rester proches de leurs rejetons afin de s’assurer qu’ils ne se perdront pas entièrement. En les conservant près d’eux, ils peuvent leur enseigner les us et coutumes de leur nouvelle race et, ce qui est plus important encore, les usages de leur nouvelle lignée. Certains toutefois n’arriveront jamais à surmonter leurs instincts prédateurs et finiront par dégénérer en terribles Varghulfs.

Ce n’est pas que les Vampires soient obligés de vivre dans le secret le plus absolu, mais plutôt qu’il existe souvent de meilleures manières de procéder, des protocoles à respecter et des devoirs à accomplir. Se nourrir sur un territoire trop étendu ou de manière trop extravagante est généralement considéré comme inconvenant. Tout comme les nobles des provinces ont un devoir envers leurs serfs, même si les vies de ces paysans ne sont rien pour eux, le berger doit prendre soin du troupeau, même s’il se nourrit de son bétail. Les Vampires ont le devoir de veiller sur les créatures inférieures qui les entourent, premièrement pour les protéger afin qu’elles leur procurent une nourriture régulière mais également et surtout pour donner à ces créatures quelque chose de plus grand qu’elles-mêmes à admirer, quelque chose qui puisse leur inspirer de la terreur, de l’admiration respectueuse et un sentiment de majesté. Les hommes ont besoin des rois, comme on dit, mais les rois, eux, ont besoin des Vampires.

Le mystère, une certaine solitude et la subtilité leur sont également utiles. Le loup chasse mieux à la lueur de la lune, lorsque sa proie ne peut le voir venir. Ceci étant dit, il n’existe pas de tabou contre le fait de se livrer à un carnage effréné ou de s’adonner à d’autres complaisances de grande envergure, ces comportements sont acceptés comme très habituels chez les nouveau-nés. Le seul impératif est de respecter les précautions et l’attitude appropriées, telles qu’elles sont définies par leur nouvelle lignée et leur nouveau maître. Chaque Vampire a ses propres coutumes, qu’il inculque à sa progéniture. Ainsi, de même que les Vampires sélectionnent leurs nouveaux frères de sang avec la plus grande circonspection, ils prennent grand soin dès le début d’immerger ceux qu’ils ont choisis dans les traditions et les croyances de leur lignée, parfois même avant de leur avoir accordé le Baiser de Sang. De nombreux Vampires prennent d’abord ceux qu’ils trouvent dignes d’entrer dans leur famille comme apprentis, assistants, courtisans ou compagnons ; ils les gardent auprès d’eux pendant de longues années avant de les récompenser en leur accordant le Baiser et même après. Ainsi, ils peuvent prendre le temps de s’assurer des qualités de leurs élus et leur enseigner les bonnes manières. Par ailleurs, l’une des agréables conséquences de ce genre d’arrangement est qu’ils peuvent ainsi disposer d’une réserve de sang constante.

Source[modifier]

  • Warhammer JdR - Les Maitres de la Nuit
  • Drachenfels, de Jack Yeovil, aux éditions Bibliothèque Interdite
  • Liber Nécris