L'Épouse de Khaine

De La Bibliothèque Impériale
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Bien qu'ayant cherché à rester le plus fidèle au sens du texte, nous ne
pouvons en assurer l'authentique et sincère exactitude.


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Saison du Sang, année 223 de l’Âge de la Vengeance


Je suis la reine brisée d’une ville brisée.

Je suis assise sur mon trône de fer, dans la sombre chambre en pierre au sommet de ma tour, et je regarde, les yeux troublés par le feu et la mort, les rues en dessous.

« Comment osent-ils ? » Je chuchote de nouveau à travers des lèvres fêlées et déchirées. Le culot des humains, envahissant ma ville et tuant mon peuple. Moi seule ai le droit de tuer chaque Druchii de Har Ganeth, au nom de Khaine, et non eux.

Je devrais être là-bas parmi eux, tuant les adorateurs barbares du soi-disant Dieu du Sang et tous ceux assez sots pour se mettre entre moi et eux. Mais je suis prise au piège ici. Ce soir, c’est la Nuit des Supplices, la nuit de Khaine, lorsque à travers tout Naggaroth, mes filles se délectent du culte de la Main Sanglante, tombant sur les imprudents et assouvissant leurs appétits pour le meurtre et le carnage.

C’est la nuit où je retrouve ma jeunesse et ma vigueur.

Depuis des mois, j’ai été frêle, ma peau parcheminée et mes os fragiles. Je me suis enveloppée de fourrures, comme beaucoup de sauvages nordiques ci-dessous, pour me protéger du froid qui fait frissonner mon âme. Mes cheveux sont secs et grisonnants, ma vue s’est effondrée, mes articulations craquent. C’est pourquoi je ne suis pas en train de tuer. Mais dans quelques heures seulement, les lunes se lèveront et je me baignerai dans le Chaudron de Sang. Je serai de nouveau forte, et je me vengerai sur tout ce qui se trouve sur mon chemin.

Je me concentre sur le miroir en cristal devant moi, en essayant d’ignorer mon reflet hideux qui apparaît derrière les images du carnage. La scène se déplace, suivant mes pensées et en cherchant un seul visage. Je cherche mon champion.

« Mon champion… »


Tullaris Porteur de Mort maniant le Premier Draich
Les mots étaient comme un murmure dans la brise, mais ils brûlèrent l’esprit de Tullaris Porteur de Mort avec la force d’un ouragan. Il maniait le Premier Draich, taillant le torse tatoué d’un sauvage du nord, et murmurant une prière en réponse à la divinité qui lui parlait. Les mots de Khaine prouvaient que le dieu était satisfait du massacre de cette nuit - comme il l’avait été chaque jour de ces dernières semaines. Depuis que la Horde Ensanglantée avait attaquée Har Ganeth, beaucoup d’âmes avaient été offertes à l’étreinte du Dieu du Meurtre.

Tullaris se retourna, tranchant dans un jet de sang avec son draich la gorge d’un guerrier humain en armure. Dès que l’adepte du Chaos tomba, deux Hommes-Bêtes avec des têtes de boucs et des fourrures grotesques, tenant des haches larges et grossières, prirent sa place. Le premier éleva sa hache et sauta sur le Héraut de Khaine. D’une frappe rapide, Tullaris brisa le manche en bois de la hache et trancha les poignets de l’Homme-Bête dans une contre-attaque. La créature s’effondra, agonisante, tandis que le second adversaire attaquait dans le dos l’Exécuteur, visant son cou.

Tullaris para l’attaque maladroite et frappa, mais la créature esquiva son coup, se déplaçant plus rapidement que l’Exécuteur aurait jugé possible pour une telle brute.

« Impressionnant, pour une bête sauvage, » murmura-il, tout en balançant un coup de son coude blindé avant d’attraper la bête du Chaos par sa gorge, écrasant sa trachée. Elle laissa tomber sa hache et s’accrocha à son cou déchiré. Tullaris se retourna lentement, enfonçant la pointe de son draich dans le sol trempé de sang avant de tirer son poignard du fourreau accroché à sa ceinture. Alors que le bête s’étranglait et haletait, l’Exécuteur gravait la rune de Khaine sur sa poitrine, avec lenteur et précision. Il le regarda, et s'émerveilla du fait que ces créatures sans conscience puissent être une menace pour les terres des hommes. La faiblesse de ces races inférieures était vraiment pathétique.

« Tu te demandes pourquoi je fais cela, bête, » dit-il. Il savait qu’elle ne serait pas capable de le comprendre, mais il fallait maintenir les principes. « Si vous étiez un Elfe, j’utiliserais le Premier Draich. Mais vous n’êtes pas digne de cette lame, la première à être bénie par Khaine en personne lorsque mon ordre fut fondé. »

En terminant sa gravure, il regarda le sang de l’Homme-Bête s’écouler de la forme du symbole sacré. Il essuya son poignard sur la fourrure sale de la créature, le remit dans sa gaine et se pencha près du guerrier étouffé.

« Non, vous n’en êtes pas digne, vermine, mais cela m’amuse de priver vos sombres maîtres de votre âme telle qu’elle est. A travers cette marque, vous êtes marqué comme appartenant à Khaine. Et quand vous mourrez, vous lui appartiendrez, et non aux Dieux de la Ruine qui vous guident. Comprenez l’honneur qui vous a été accordé, et combien vous l’avez mérité. »

La bête griffa frénétiquement le cuir chevelu de Tullaris. Il la laissa faire. Elle ne pouvait plus rien tenter contre lui. Il la regarda jusqu’à ce que la lumière disparaisse de ses yeux.

« Seigneur Khaine, » murmura-t-il, « Je vous envoie cette maigre offrande, la première parmi beaucoup, pour votre nuit, la Nuit des Supplices. Voyez cela comme le signe d’un accord entre nous, et prêtez-moi votre force. Que les meurtres que je commets cette nuit soient en votre nom et pour votre gloire. »


La Horde Ensanglantée envahie Har Ganeth…
Évidemment, Tullaris est au cœur des combats. Je serais fière, si j’éprouvais un quelconque attachement ou émotion. Je suis plus proche de lui que de n’importe quel autre être vivant, mais je ne ressens rien pour lui. Il est utile, une arme et rien de plus. Et encore… Ce n’est que dans ces moments-là, quand je suis le plus vulnérable, que je peux me permettre d’admettre que j’ai besoin de lui. Il est le seul Druchii auquel je fais confiance pour vraiment me protéger. Je sais qu’il est totalement dévoué à Khaine. Il entend la voix de notre seigneur, agit selon sa volonté. Je souhaiterais pouvoir dire la même chose. Je n’agis que pour moi dans les faits. Ce que j’accomplis apporte la gloire à la Main Sanglante, car le meurtre est son sacrement, mais je le fais parce que j’aime le faire. Couper la chair, entendre l’agonie d’une voix, regarder la vie partir d’une enveloppe mortelle : c’est ce qui me fait véritablement plaisir. La mort est ma vie, et il en va de même pour Tullaris.


Tullaris, debout, leva le Premier Draich du sol et regarda autour de lui à la recherche de sa prochaine cible. Autour de lui, les humains et les Hommes-Bêtes se faufilaient dans les rues, éclairés par des feux vacillants et percutant des petits groupes de Druchii.

Ce qui avait commencé comme une bataille à grande échelle s’était rapidement transformée en une série de nombreuses escarmouches, avec des bandes de guerre de Maraudeurs et de demi-hommes se ruant à travers les débris et les flammes. Les Furies du culte Khainite avaient prouvé leur valeur de nombreuses fois ces dernières semaines, l’assurance et la soif de sang sauvage du credo de ces filles guerrières faisaient de ces escarmouches des lieux où elles exprimaient leur plein potentiel.

Les Exécuteurs de Tullaris n’étaient pas moins habiles pour le meurtre, mais ils étaient parvenus à l’adapter en une méthode de guerre. Si un Druchii pouvait être vraiment à l’aise avec d’autres à ses côtés, c’était un Exécuteur. Au cours des millénaires, Tullaris les avait entraînés au sein d’une unité, et exercés à se battre en rangs en comptant sur les compétences mortelles de leurs frères autant que sur les leurs. Il leur avait fallu du temps pour s’habituer à la guérilla qu’exigeait la situation.

Le Héraut était l’exception. Il était toujours seul, ne faisant jamais confiance à autrui - sa position d’exalté dans le culte ne le lui permettant pas. Il n’a pas même pleinement confiance en elle.

Hellebron. Il la servait depuis aussi longtemps qu’il pouvait s’en souvenir, depuis cette première Nuit des Supplices, lorsque Khaine lui avait parlé et qu’il avait pris sa première vie. Elle avait été sa vie, sa maîtresse, son amour, sa reine. Elle l’exaspérait maintenant, quand sa présence était nécessaire, quand sa ville était en flammes et assaillie par les ennemis, elle n’était pas dans les rues à verser le sang au nom de Khaine. Il leva les yeux vers le sommet de sa tour, le point le plus haut de la ville, visible de n’importe où pour souligner que chaque Elfe de Har Ganeth était sous son regard et son pouvoir. Le regardait-elle, pensa Tullaris ? Est-ce qu’elle se délectait de la gloire qu’il avait apporté au culte et au dieu ?


Il est éternellement jeune et fort, mon champion. C’est une preuve supplémentaire de sa connexion avec notre seigneur. La force de Khaine coule dans ses veines. Je le sais. Je l’ai goûté. Quand je me suis fraîchement baignée dans le Chaudron de Sang et que je suis forte, nous formons un duo formidable. Rien ne peut nous résister, et je me réjouis du carnage que nous causons. Mais quand je suis dans mon état actuel, je vois parfois quelque chose dans ses yeux, quelque chose que je ne comprends pas. Je l’ai étudié, et je pense que c’est de la pitié. C’est une émotion étrangère pour moi, mais je sais qu’il la ressent. Une faiblesse, que je peux exploiter si je le veux. C’est pourquoi je refuse de ressentir quelque chose pour lui.


Tullaris avança jusqu’à un angle d’une large avenue doublée. Les instructions chuchotées par Khaine l’avaient amené ici, dans des rues bordées de grandes maisons, leurs portes ouvertes, de cadavres mutilés d’Elfes tombés en défendant leurs foyers. Tullaris n’avait aucune sympathie. Ils étaient faibles. La ville était plus forte sans eux.

Dans la rue devant lui, des cadavres avaient été empilés et enflammés, les grands bûchers éclairant un cercle d’humains lourdement protégés qui entouraient une silhouette imposante. Cette silhouette s’imposait en taille et en carrure par rapport aux autres, son armure rouge et d’or brillant dans la lueur des flammes. Il tenait dans une main un casque en forme de crâne et orné d’une crête qui imitait le rune angulaire de son dieu. Son visage, sauvage et meurtri, portait aussi le symbole, dans ce qui ressemblait à du sang séché. De toute évidence, c’était un puissant champion du Nord. Tullaris sourit sous son casque en forme de tête de crâne. Le Dieu de Meurtre l’avait en effet guidé pour faire un grand sacrifice.

« Au nom de Khaine, regardez-moi, adorateur des Démons. » cria-t-il. Le champion se retourna et un sourire se dessina sur son visage bosselé et ensanglanté. Il fit signe à ses guerriers de se mettre à l’écart et, en jetant son casque, il leva une grande hache double du sol à côté de lui. Il avança, criant dans sa langue barbare. Les runes sur les lames de sa hache frémissaient dans la lumière des flammes, comme en prévision de la bataille à venir.

« Je ne te comprends pas, sauvage, » dit Tullaris, « mais je vais prendre ça pour un oui. »

Le Champion du Chaos rugit et se dirigea vers lui, la hache levée. Tullaris se tenait debout, empoignant légèrement le Premier Draich d’une main. À mesure que la hache s’approchait, il s’avança calmement sur le côté et balança son arme dans un arc nonchalant. Il trancha dans l’armure rouge sang du champion. C’était comme couper de la chair, mais elle bloqua l’arme. Tullaris essaya de la retirer, mais elle était coincée.

Le champion se mit à rire et le tira en arrière, renversant Tullaris sur le sol boueux. L’Elfe roula lorsque la hache s’abattit sur lui, et donna un coup de pied. Il atteignit l’amure au niveau du tibia et une douleur parcourue sa jambe.

« Par Asuryan, » jura-t-il et il se releva. Il évita un coup vicieux, saisit le manche de son draich et lutta. Il ne bougeait pas de là où il était bloqué. Il recula de nouveau face au champion alors que la grande hache visait son cou. Désespéré, le Héraut de Khaine se mit à la recherche d’une arme. Les seuls que l’on pouvait apercevoir étaient ceux des huit Guerriers du Chaos qui entouraient les deux combattants. Pour l’instant, ils semblaient se contenter de le regarder, mais s’il tentait de s’emparer d’une de leurs haches ou épées, ils se joindraient sans aucun doute au combat et les probabilités seraient contre lui.

Son genre de combat.


Je me détourne du miroir de cristal. Regarder Tullaris combattre le champion du Nord m’a plu, dans la mesure où il apporte la gloire à la Main Sanglante, mais j’ai d’autres affaires à régler. Le soleil se couche et je dois me préparer au rituel à venir.

Je tire mes fourrures sur moi et me lève de mon trône. La douleur parcourt mon dos et je trébuche. Je m’appuie sur l’accoudoir du trône et attends un instant que les vertiges passent. J’ai une longue marche à faire à travers les couloirs sinueux de mon palais au sanctuaire où le Chaudron m’attend. Là, mes servantes réciteront les prières rituelles et sacrifieront de méritants Druchii. C’est ce destin que mon peuple doit connaître, et pas celui des vulgaires haches des humains.

Mon cœur s’accélère, battant dans ma poitrine creuse alors que je me déplace vers la porte. Mes jambes me font mal, mes os craquent et tout n’est que douleur. Je dois être forte à nouveau. Cette faiblesse physique est intolérable. Mes bottes résonnent contre le sol en pierre, le son attirant l’attention des gardes qui se tournent vers moi.

« Vous souhaitez vous rendre au sanctuaire, maîtresse ?, » demanda l’un d’eux. J’ignore qui il est. Je n’ai jamais voulu connaître les noms des Exécuteurs de Tullaris.

« Je souhaite que vous trouviez le Seigneur Tullaris, » lui répondis-je dans un murmure sec, comme un papier craquant dans un feu. Les deux gardes échangèrent un regard.

« Cela… peut prendre du temps, ma dame, » dit l’autre. « Et notre seigneur serait très mécontent si nous vous laissions sans protection. »

La colère s’éveilla et, pendant un moment, elle fit disparaître la douleur et la faiblesse. « Tu me trouves trop faible et décrépite pour être capable de me défendre ?, » demandais-je. L’Exécuteur recula comme s’il avait été foudroyé. Même dans cet état, ils craignent ma colère. Je suis l’Épouse de Khaine, et nul ne doit déclencher mon courroux. Je ne pensais qu’à écorcher ces hommes vivants et à utiliser leurs peaux comme literie.

« Non, ma dame, je… »

« Cela déplairait au Seigneur Tullaris de constater que vous êtes déloyaux envers le culte, à Khaine, » dis-je avec insistance. « Et n’oubliez jamais, votre maître est mon champion. Il ne répond qu’à moi. »

Cet avertissement fut bien compris. Il ne serait pas le premier des guerriers de Tullaris à perdre sa tête d’un coup du Premier Draich sur mon ordre. Il hocha rapidement la tête et suivit son camarade vers la chambre. Lentement et douloureusement, je laissai la chambre sous leur surveillance. Cela me prit beaucoup de temps - je ne sais combien - mais je franchis des chambres et de longs couloirs, et descendis un long escalier en spirale, à mesure que les ombres s’allongeaient et s’assombrissaient.


D’un geste fluide, Tullaris tira son poignard et le lança dans la gorge d’un des guerriers. Il courrait déjà sur lui avant que la lame n’atteigne la chair corrompue de l’homme, et lorsque le guerrier du Chaos s’affaissa sur le sol, l’Elfe tira une large épée du fourreau en fourrure. En se retournant, il la leva et dévia un coup de la hache du champion. Dans une contre-attaque, il atteignit avec le bord denté de l’épée le manche de la hache, qui éclata en deux. Le champion chancela et Tullaris poussa son avantage plus loin. Il vit du coin de l’œil un mouvement et se retourna pour parer un coup d’un guerrier possédant un troisième œil sur son front. Dans un rugissement de joie sanglante, il enfonça sa lame dans la gorge de l’homme et lui arracha le cou.

Le guerrier resta immobile un moment, le sang s’écoulant de la plaie, puis il tomba silencieusement, face contre terre dans la boue. Tullaris jeta son épée et ramassa la hallebarde de l’homme à terre. Il évita un coup d’épée d’un autre guerrier et sauta, levant la hallebarde au dessus de sa tête.

« Pour Khaine ! » hurla le Héraut alors qu’il abattait la hallebarde sur le Champion du Chaos, fendant son crâne en deux. Alors que le champion tombait, son armure se décomposa et se racornit. Le Premier Draich glissa dans la boue. Tullaris le récupéra et se tourna vers le premier des six guerriers du Chaos restants. L’humain le chargea, une masse dans chaque main. Les autres barbares étaient derrière lui, les armes et les boucliers levés.

Cela allait être une distraction amusante.


J’entre dans le hall qui me conduira au sanctuaire de Khaine, qui se trouve au cœur de mon palais. C’est un site d’une grande importance, le premier lieu où le sang fut versé à Naggaroth. C’est pourquoi il a été construit ici, et pourquoi Har Ganeth a grandi autour de lui. Ma ville, dédiée au meurtre absolu.

Je trébuche, et tend mon bras gauche pour arrêter ma chute. C’est une erreur. Je ressens quelque chose dans mon poignet et maudis ma stupidité. La douleur se propage en moi, en même temps que l’adrénaline, et j’attire mon bras près de ma poitrine, le berçant. Pathétique, mais je ne peux rien y faire.

C’est seulement alors que je vois, à travers mes yeux vitreux, sur quoi j’ai trébuché. C’est sur une de mes servantes. Elle s’appelle Iulianeth et elle m’a servi plus de trois cent ans. Elle m’a vue sous mon meilleur jour comme sous mon plus sombre. Elle connaissait ma fureur et mes désirs. Elle a partagé mon lit plus que n’importe qui d’autre. Maintenant, elle est morte, et la douleur était gravée sur ses traits. D’horribles souffrances et des tortures que j’ai déjà vue sur ceux qui m’ont exaspérés.

Je ressens de la colère et de la fureur envers Iulianeth pour sa faiblesse. Se faire tuer est impardonnable. Quand tout sera terminé, je m’emparerai de toute sa famille et les torturerai pour la punir de son échec.

Autour de moi, les ombres se rapprochent.


« Je ne suis pas Morathi, mais ce n’était pas vraiment ce que vous disiez, n’est-ce pas ? »
Les guerriers étaient tous morts après un combat acharné. Tullaris s’en était sorti indemne, bien que son armure avait besoin d’être réparée, le guerrier qui maniait la masse ayant endommagé le plastron. Tullaris avait continué à chasser de dignes sacrifices, mais n’avait trouvé que des rues vides et des ombres croissantes. La nuit approchait.

Le Héraut leva à nouveau la tête vers la tour d’Hellebron. Là-haut, elle se préparait au rituel de la Nuit des Supplices qui renouvellerait sa jeunesse et sa vigueur. Il devrait être avec elle, comme chaque année depuis d’innombrables siècles. Il était resté à ses côtés pendant des semaines, depuis que la Horde Ensanglantée était entrée dans la ville.

Sa rage avait été magnifique, mais aussi étrangement pathétique, car son infirmité l’avait fait tousser et ébranler, avant de la faire tomber à genoux, alors qu’elle criait vengeance contre tout les dieux du panthéon de la Ruine. Voir la Reine de Hag ainsi rappelait toujours à Tullaris qu’il était son esclave, et qu’il pouvait en finir d’un simple geste. La direction du culte pourrait lui revenir. Il n’avait qu’a tendre la main et la prendre. Et pourtant, il ne l’a jamais fait, et il n’était pas tout à fait sûr de la raison.

Perdu dans ses pensées, le Héraut de Khaine faillit presque ne pas remarquer le mouvement dans l’ombre. Il pivota, tenant le Premier Draich en position défensive, mais rien ne se passa. Encore une fois, un vacillement dans sa périphérie. De nouveau, il vit un mouvement dans l’obscurité, des flèches en os se fondant dans une silhouette.

Une paire de jambes apparue en premier, légères et musclées. Elles reliaient un torse mince, d’où poussait de longs bras et une tête couronnée d’une crinière de cheveux brillants. C’était une femme, belle et cruelle. Dans une main, elle tenait un long bâton surmonté de trois lames vicieuses. Elle fit un geste nonchalant avec l’autre main et l’arme de Tullaris tomba de ses doigts brusquement engourdis. Un autre geste et l’Exécuteur fut forcé de se mettre à genoux tandis qu’elle se déplaçait vers lui.

Elle était jeune et magnifique. Sa peau était aussi pâle que le marbre, tachée de veines d’un bleu délicat. Ses yeux en amande se fixèrent sur Tullaris et il fut inondé par ses souvenirs de ses nuits avec Hellebron, mais ils furent altérés pour la remplacer par cette étrangère à sa place. Par un effort, il brisa le contact visuel et les visions disparurent comme un brouillard dans le vent. Il détourna les yeux de son visage et vit une rune tatouée sur son ventre. Les marques angulaires représentaient Ghrond. Il savait qui était cette Elfe, et il savait qui l’avait envoyée.

« Morathi, » grogna Tullaris .

« Non, mon Seigneur Porteur de Mort, » ronronna t-elle. « Je ne suis pas Morathi, mais ce n’était pas vraiment ce que vous disiez, n’est-ce pas ? »

La voix de la sorcière était enjouée, et elle marchait autour du Héraut pendant qu’elle parlait. Il était toujours sous l’emprise du sortilège qui l’avait mis à genoux, et ne pouvait pas la voir quand elle passait derrière lui. Il se concentra et inspira profondément, essayant de combattre la Magie qui l’immobilisait.

« Non, mais vous êtes l’un de ses jouets, » déclara-t-il.

« Vous jouez avec les mots. » La sorcière sourit lascivement. « Oui, j’appartiens à Morathi, de la même manière, je suppose, que vous appartenez à Hellebron. »

« J’appartiens à Khaine, tout comme ma reine, » répondit calmement Tullaris. « Je la sers dans son rôle de chef du culte. »

« Et c’est tout ? » plaisanta la sorcière. « Intéressant. Et peut-être que cela rendra l’offre que j’apporte encore plus… attrayante. »

« Il n’y a rien venant de votre maîtresse qui puisse m’intéresser. Laissez-moi maintenant, sorcière, à moins que vous ne vouliez sentir le baiser du Premier Draich. »

« Oh, tellement intimidant, » se moqua-t-elle. Elle s’approcha et prit son menton avec sa main libre, l’étudiant comme un acheteur d’esclaves examinant un achat potentiel.

« Je suis sûre que vous aimeriez dégainer votre arme contre moi, Exécuteur. Mais vous devez vraiment entendre mon offre. Dame Morathi, Reine de Ghrond et réincarnation mortelle de sainte Hekarti, souhaite forger une alliance avec le culte de Khaine. »


Je me suis remise debout, ignorant la douleur de mon poignet brisé qui remonte le long de mon bras. Qui - ou quoi que ce soit - ayant tué Iulianeth, il est encore là. J’entends sa respiration. J’essaie de courir, mais mon misérable corps me trahit une fois de plus, la douleur et la rigidité me faisant trébucher, ma main valide agrippant un mur anormalement froid pour le soutenir. Je dois atteindre le Chaudron. Je dois être forte.

Je décide de prendre le chemin le plus direct, mais dangereux car il amène hors de mon complexe palais privé et se dirige vers le hall principal qui traverse le plus grand palais jusqu’à la salle du trône public. C’est l’aboutissement d’une grande route qui s’étend jusqu’aux portes extérieures de la ville. Ceux qui souhaitent une audience avec moi doivent marcher de là-bas à ici, au cœur de Har Ganeth. La symbolique est évidente, mais pas moins puissante.

Je sais que la zone a été le lieu d’escarmouches entre mes forces et les envahisseurs, mais je dois prendre le risque d’être attaquée. De toute façon, il est certain que quelque chose me traque. Je peux le sentir. Je me demande pourquoi il ne frappe pas alors que je suis seule et vulnérable. Est-ce pour me faire peur ? Pour essayer d’arrêter mon cœur affaibli à travers une terreur pure ? Si c’est le cas, c’est stupide. Pendant sept millénaires, j’ai servi Khaine et j’ai gouvernée six millénaires Har Ganeth. La peur n’existe plus en moi. Je suis tout simplement furieuse.

« Faites-moi face, » murmurais-je. Même si je pouvais élever la voix, je ne le ferais pas, pas quand j’essaye d’échapper à un poursuivant. « Ou bien me crains-tu, même si je ne suis qu’une vieille femme desséchée ? »

Ma raillerie apporta une réponse. Autour de moi, les ombres rirent.


« Hekarti ? Dans quelle vanité la Reine des mensonges s’est-elle maintenant fourvoyée ? »

Tullaris était incrédule. La Maîtresse de la Magie était l’une des plus grandes Elfe du panthéon. Que Morathi déclare être son incarnation était un acte d’arrogance suprême. Seul Malékith avait déjà osé dire être la manifestation d’un dieu, Khaine lui-même. Et c’était un mensonge. Tullaris le savait, car le dieu le lui avait dit.

« Elle est Hekarti, » dit la sorcière. « Les temps changent, Tullaris. Les dieux sont de nouveau parmi nous. Khaine et Asuryan vont s’affronter, et le monde tremblera. Mais les cycles mythiques ne doivent pas se répéter, Tullaris. Khaine peut être le meilleur phénix. S’il a le bon hôte, quelqu’un d’assez fort. Quelqu’un ayant une connexion avec Lui… »

Tullaris laissa les mots imprégner son esprit. Les implications étaient troublantes, mais les possibilités étaient indéniablement séduisantes.

« Quelle est votre offre, sorcière ? » demanda t-il.

Elle se détourna. « Ma maîtresse vous offrira la place d’Hellebron à la tête du culte. Vous serez oint comme incarnation de Khaine et vous vous unirez avec Hekarti. Le Meurtre et la Magie domineront Naggaroth ensemble. »

« Malékith risque d’avoir quelque chose à dire à ce sujet. »

« Son cas sera traité, » déclara t-elle avec une moue de dédain. « Les plans sont déjà en mouvement. Même maintenant, le seigneur de Hag Graef planifie la mort de Malékith. »

« Darkblade ? » cracha Tullaris. « Il échouera. »

« Ne sous-estimez pas Malus Darkblade. Il est plus que ce que l’œil nu peut voir. »

« Quoi qu’il en soit, votre offre est intrigante. Vous n’avez besoin de moi que pour tuer Hellebron ? »

« Non. Cela est également pris en charge. Nous n’avons besoin que de nous emparer de sa place. »

« C’était tout ce que j’avais besoin de savoir, » dit Tullaris en se levant et en attrapant la sorcière par la gorge.


Le sanctuaire de Khaine
Je me dépêche tant que je peux et arrive finalement dans le hall principal. À ma grande surprise, la grande artère est vide. Pendant des semaines, les adorateurs du Chaos l’ont attaquée, attirés par le sanctuaire de Khaine, envoyés par leur divinité imbibée de sang pour tenter de souiller la sainte structure et installer un de leurs champions sur mon trône.

La large voie est jonchée de corps : Elfe, humain et Homme-Bête. Entourée de cadavres, je traîne mon corps endolori. Jusqu’à présent, je restai dans l’obscurité, mais il n’y a aucun moyen de traverser la rue sans entrer dans la lumière des lunes, l'une étant grande et pâle, l’autre petite et projetant une lumière verte.

Je vois le sanctuaire, un grand édifice de marbre écarlate. Dans ma précipitation pour l’atteindre, je ne vois pas où je mets les pieds et je trébuche, vacille, tombe. Cette fois, je ne fais pas l’erreur de freiner ma chute d'un bras et je chute sur le cadavre pourrissant d’une de mes Furies. Une autre faible, pour être tombée sous la lame d’un humain ou d’un crasseux demi-animal. Autour, les mouches volent et les larves se tordent vers moi.

Et en face de moi, les ombres se regroupent pour former une silhouette. Femme, jeune, vêtue des couleurs de Ghrond.

« Bien sûr, » d’une voix rauque en me mettant à genoux. « L’un des chiots de Morathi. Alors elle profite de cette situation pour mettre fin à notre querelle. C’est un bon plan. J’aurais aimé y avoir pensé en première. »

La sorcière s’agenouille devant moi et tire un court couteau de sa ceinture. Y sont inscrits des runes qui dansent le long de la lame. Elle me regarde dans les yeux.

« Tout change, et Morathi a besoin de se débarrasser de vous. Votre inimitié ne l’amuse plus. Elle m’a demandé de vous livrer un message avant que ce couteau ne glisse dans votre cœur, reine des hags. »

« Oh, veillez me tuer et épargnez-moi ses stupides bavardages, » dis-je. Enragée, elle me délivre un coup de poing qui m’étend au sol. Je tends ma main qui touche quelque chose de froid. Quelque chose de métallique. Khaine me sauve une fois de plus.

« Un grand changement arrive. » La sorcière braillait. « Ma maîtresse l’a vue. Les ténèbres arrivent et les dieux marchent. Khaine se manifestera et ce sera Morathi, et non Hellebron, qui se tiendra à ses côtés. » Elle saisit le poignard rituel dans ses deux mains et le plongea vers le bas.

Je roule, bien que cela provoque une agonie dans mon corps, et je poignarde vers le haut avec le long couteau que ma Furie portait autrefois. Je suis récompensée par un hurlement douloureux. Elle frappe brutalement et m’entaille la jambe, une déchirure longue et profonde. Je frappe de nouveau et le sang éclabousse mon visage. Je l’avale et le goûte, je sens le pouvoir. Je suis revigorée et je me jette sur elle. La douleur me quitte, remplacée par une brume rouge. Durant un instant, j’envisage ce que certains murmurent, que Khaine et le dieu sanglant que les habitants du Nord adorent sont les mêmes. Je rejette cette pensée indigne. Nous ne hurlons pas comme des sauvages à la recherche de crânes et de sang. Bien que si on me voyait dans cet instant, on ne le croirait pas.

Une fois la soif de sang passée, je domine un tas de chair ensanglanté qui était autrefois une sorcière. Je regrette brièvement de n’avoir pas eue le temps de consacrer sa mort à Khaine. La force se dissipe, et je tombe. De mon bras valide, le sang s’écoulant d’une jambe qui s’engourdit rapidement autour de la blessure - le couteau était empoisonné, je suppose - je commence à me traîner vers mon apothéose.


La main libre de la sorcière de Morathi commença à gesticuler, mais Tullaris cassa son poignet. Son hurlement de douleur cessa lorsqu'il serra sa gorge encore plus fort.

« Vous avez envoyé des assassins ? » grogna-t-il.

Elle hocha la tête frénétiquement, et il détendit sa poigne.

« Nous sommes trois, » cria t-elle. « Les Drakirites de Morathi. J’ai été envoyée à votre rencontre. Mes sœurs seront déjà avec la Hag- »

Un craquement sec coupa les paroles de la sorcière alors que Tullaris brisait son cou. Il laissa tomber le corps au sol. Autour de lui, les ombres disparurent. Un hurlement déchira la nuit, suivi de près par un autre. Les deux provenaient du palais d’Hellebron.

« Les Drakirites, » murmura-t-il. « Comment c’est théâtral. » C’était typique de Morathi de nommer ses assassins d’après la déesse de la vengeance, grandiloquent et ridicule. La menace qu’elles représentaient était cependant réelle. À l’heure actuelle, deux d’entre elles traquaient Hellebron dans l’obscurité de son palais à moitié abandonné, et seul Tullaris le savait.

Le meurtre de son émissaire ne changerait pas l’offre de Morathi. Tout ce qu’il avait à faire était de laisser les sœurs de la sorcière accomplir leur mission et il serait sur la voie pour devenir l’un des Elfes les plus puissants de Naggaroth. Il leva les yeux une fois de plus vers la tour qui scindait le ciel et demanda à Khaine de le guider.


Enfin, j’atteins le sanctuaire de mon maître. Normalement, je me réjouirais de l’architecture proclamant la gloire de Khaine, des grandes statues de lui et des peintures murales exposant ses actes durant les Guerres des Dieux. Mais maintenant, je suis faible. Je meurs. Je regarde derrière moi et vois une trace de mon propre sang remontant jusqu’au cadavre de l’assassin. Tant de sang. Je souffre le martyre au niveau de mon bras et de ma hanche et je peux à peine sentir mes jambes. Un autre effort laborieux m’amène au Chaudron.

Je me roule sur le dos et regarde vers le haut, au-delà du grand plafond voûté, décoré des peintures représentants les Exécuteurs de Tullaris et mes Furies. Mon regard est attiré par la statue de Khaine qui surmonte le Chaudron de Sang. Elle représente mon seigneur empoignant un poignard dans une puissante main et un cœur dans l’autre. Il se peut que se soit mon cœur qu’il porte, prêt à y plonger l’arme. Ma mort est certaine maintenant. Je me demande si il va m’accueillir à ses côtés ? Ou ma faiblesse responsable de ma mort de la main d’une simple sorcière, risque t-elle de me damner pour toujours ?

J’essaie de monter les marches qui mènent au Chaudron. Je n’y arrive pas. J’essaie encore. Je vais mourir en essayant. Je ne vais pas abandonner. Je ris amèrement.

« Sept mille ans, sept mille années à votre service, et cela se termine ainsi ? Mourir vidée de mon sang jusqu’à la dernière goutte sur le sol de votre sanctuaire, à quelques centimètres du salut ? »

Je ferme mes yeux. Quand je les rouvre à nouveau, il fait totalement noir autour de moi. Me suis-je endormie ? Non, si j’étais tombé dans l’inconscience avec tout le sang que j’ai perdue, je ne me serait pas réveillée. Qu’était-ce donc ?

Les ombres bougent et je comprends. Elles se fondent, tournoyant pour former une silhouette elfique. Un autre assassin. Évidemment, Morathi n’en avait pas envoyée qu’un seul. Elle ressemble exactement à l’autre. J’aurai pu penser qu’elle était revenue à la vie, si elle n’était pas un morceau de chair battue à cent pieds de distance.

« Je suis sans arme, » murmurais-je. « Sans espoir. Je suis à votre merci. Bien que je n’attend aucune pitié de vous. »

« Est-ce que vous en montreriez, si nos situations étaient inversées ? » Sa voix est douce.

« Non, » admettais-je. « Tu serais déjà morte, dans de terribles souffrances. »

« Eh bien, sois heureuse que je ne sois pas toi, Hellebron. Je ne vais pas vous tuer. Je dois délivrer un message. Vous devez vivre. Vous devez déjouer les plans de Morathi. Elle est folle, elle- »

Elle fut coupée, métaphoriquement et littéralement, sa tête se détacha de ses épaules et disparue de mon champ de vision. Son corps resta sur place une seconde, puis tomba sur le côté, révélant la forme d’un Exécuteur, le draich relevé. Mais ce n’est pas n’importe quel draich, et pas pas n’importe quel Exécuteur.

« Tullaris, » dis-je faiblement. « Le Chaudron… »

Il ne dit rien. Il ne bouge pas. Il me regarde, le Premier Draich encore levé. Lentement, il retire son casque en forme de crâne et, dans ses yeux, brillait une lueur meurtrière. Je l’ai vue plusieurs fois, mais jamais dirigée vers moi.

Pour la première fois depuis longtemps, je connais la peur. Et pour la première fois, je reconnais que j’ai besoin de Tullaris Porteur de Mort. Je l’aime. C’est ma plus grande faiblesse. Aimer un autre, en avoir besoin, c’est vous rendre vulnérable. Et je suis maintenant plus vulnérable que jamais.

Pendant un long moment, nous restons sans bouger, certaine que je vais mourir des mains de mon champion. Mon… amour. Puis, ce moment prit fin. Il dépose son arme et s’agenouille. Il me lève, je m’enfonce dans ses bras et me laisse sombrer dans l’inconscience. La dernière chose que je ressens, c’est mon corps immergé dans le sang du grand Chaudron de Khaine.


Tullaris regarda Hellebron sortir du Chaudron de Sang. Sa chair lisse d’une pâleur albâtre était aussi sublime et parfaite que le jour où Tullaris l’avait vu pour la première fois.
Tullaris regarda Hellebron sortir du Chaudron de Sang. Sa chair lisse d’une pâleur albâtre était aussi sublime et parfaite que le jour où Tullaris l’avait vu pour la première fois, le jour où Khaine lui avait parlé et qu’il avait versé le sang pour la première fois. À la suite de cet acte d’assassinat d’inspiration divine, elle avait fait de lui son champion, puis elle l’avait emmené dans son lit. La regarder lui coupait toujours le souffle, autant cette nuit qu’il y a des millénaires.

Bien sûr, même si son apparence évoquait Morai-Heg, il l’adorait autant qu’il la craignait. Mais maintenant, une fois régénérée, elle était une déesse. Morathi pouvait prétendre être Hekarti autant qu’elle voulait. Pour Tullaris, Hellebron était Atharti, la Dame du Désir, faite chair.

Elle marchait lentement, langoureusement, descendant les marches vers lui, un liquide pourpre coulant sur elle et s’accumulant sur les dalles, avant de s’écouler dans les fissures, comme chaque nuit de chaque année depuis six millénaires.

Tullaris eu une soudaine inquiétude et la prémonition que cela n’arrivera plus jamais.

Hellebron s’arrêta à un cheveu de lui et le regarda, le triomphe et la luxure se mêlant dans ses yeux.

« Mon champion, » souffla-t-elle. « Nous avons encore de nombreux plaisirs à expérimenter ensemble. »

« Oui, ma dame, » répondit-il en respirant le parfum de son corps mélangé à la l’odeur du sang. « Et parmi eux, tuer à nouveau à tes côtés. Pour te regarder lécher le sang du Premier Draich. »

Elle se mit à rire, refroidissant la colonne vertébrale de l’Exécuteur.

« Oh oui, mon amour. Cela et bien plus encore. Mais d’abord… » Elle bougea si vite que même l’œil de Tullaris ne put la suivre, atteignant sa ceinture et tirant son poignard de sa gaine. En un instant, il était sous sa gorge. « Qu’est-ce qu’ils t’ont offert, Tullaris ? Qu’est-ce qu’ils t’ont offert pour me tuer ? »

« Ma dame ? »

Elle appuya le couteau plus fort contre sa gorge. Il senti sa peau s’ébrécher, le sang s’écoulant sur le bord de la lame.

« Nous avons toujours été honnêtes l’un envers l’autre, Tullaris. Malgré nos nombreux défauts, nous avons toujours été sincères. Ne change pas cela maintenant. »

« Ils m’ont offert le culte, ma reine. Et une place au côté de Morathi, régnant sur Naggaroth. »

Elle lui fit un sourire sauvage et mis le poignard dans sa bouche, en léchant délicatement le liquide.

« Et pourtant je vis. J’étais à ta merci et tu m’as épargné. »

« Oui. »

« Pourquoi ? »

Il l’a regarda dans ses yeux et il y vit la chose la plus terrifiante qu'il ait jamais vu. La confusion.

« J’ai fait ce que ma conscience m’a dictée de faire, ma reine. »

« Ta… conscience. » Elle prononça le mot comme si il lui était étranger et inconnu.

« Tullaris, je suis embarrassée. Pendant six mille ans, tu es resté à mes côtés, et je n’aurai jamais crue découvrir une telle faiblesse en toi. »

« Faiblesse ? »

« Tu m’as épargné, alors que tu aurais obtenu le pouvoir et l’influence au-delà des rêves de tout Druchii. C’est de la faiblesse. C’est embarrassant. »

Elle se détourna.

« Ma dame- »

« Elle essayait de me dire quelque chose. » Hellebron s’agenouilla à côté de la tête coupée de la troisième Drakirite. « Je veux savoir ce que c’était. » Elle souleva la tête et se dirigea vers le Chaudron, où elle l’immergea dans le sang bouillonnant. Après avoir chuchoté quelques incantations, elle la retira.

La tête hurla.

L’agrippant par les cheveux, Hellebron la gifla avec force. La tête pivota dans un arc nonchalant, et des dents tombèrent au sol. Elle se tut, et ses yeux se concentrèrent sur la Reine de Hag.

« Qu’est-ce qui se passe ? » cria-t-elle. « Douleur. Tellement de douleur ! »

« Il est temps que ces barbares découvrent la vraie majesté du Dieu du Meurtre. »
« Oui, ma reine. »
« Et cette douleur n’est qu’une fraction de ce que je peux te faire sentir, » déclara Hellebron. « J’enlèverai votre esprit des griffes d’Ereth Khial et vous infligerait des tortures que vous ne pouvez pas imaginer. Dites-moi ce que vous alliez faire et vous serez épargnée. »

« Je… J’ai trahi Morathi, » déclara la tête. « Je suis venue vous avertir. Elle a vu ce qui va se passer, et le rôle que vous jouerez. Elle vous voulait morte avant que vous puissiez détruire ses projets. Mais ses plans doivent échouer, ou nous serons tous condamnés. »

« Parle clairement, misérable, » grogna la Reine de Hag.

« Le Rhana Dandra approche. La fin est proche, et les dieux sont de nouveau parmi nous. »

« Celle que j’ai tué dans la rue a dit la même chose, » déclara Tullaris.

« Porteur de Mort ! » La tête essaya de tourner, de lui faire face. Hellebron la dirigea vers sa direction. Elle se décomposait rapidement, la chair se déversant d’un crâne qui semblait vieux et usé. « Vous allez jouer un rôle, Héraut de Khaine. Vous l’amènerez dans le monde, même si vous ne vivrez pas pour le voir. » Elle fit une pause. « Lorsque la Lame des Ténèbres sera brisée par ce qui se trouve à l’intérieur, vous tomberez devant celui qui veut être roi, et le Seigneur du Meurtre se lèvera de nouveau. »

« Je dois mourir pour servir Khaine ? »

« Ce n’est pas grave, » interrompit Hellebron. « Quoi d’autre, sorcière ? »

« Le Roi Sorcier brûlera et ne sera plus, et les Druchii avec lui. Et vous, Reine de Hag, vous ne serez plus pour longtemps l’Épouse de Khaine. Vous deviendrez la maîtresse de Khorne. »

Elle rit, et son mouvement fit s’écouler le dernier morceau de chair qui glissa de l’os. Le crâne jacassa un moment avant que Hellebron ne crie de colère et le jeta à côté du Chaudron, où il se brisa. Elle se retourna vers Tullaris.

« Sottise, » dit-elle. « Un fantasme de l’imagination de Morathi. »

Tullaris ne répondis pas. Il se souvint de la Drakirite qu’il avait tué dans la rue. Ses yeux brillait d’une lueur fanatique, la ferveur d’une vraie croyante. Les derniers mots du crâne le hantèrent. Hellebron pourrait-elle réellement tomber dans l’attrait des Puissances de la Ruine ? Est-ce que son appétit pour le meurtre allait la mener à des fins plus sombres ? Il essaya de rejeter cette pensée.

« Le Rhana Dandra, » Hellebron cracha avec dédain. « Ancienne légende et rien de plus. Viens, Tullaris. J’ai été trop longtemps oisive. Il est temps que ces barbares découvrent la vraie majesté du Dieu du Meurtre. »

Elle se retourna vers lui et il vit dans ses yeux le même regard que celui de la Drakirite. Il était familier et accueillant, et remplit Tullaris d’un puissant mélange d’émotions. Mais au-delà de ce regard il remarqua quelque chose. Quelque chose qu’il n’avait jamais vu en elle avant. Cela ressemblait à du dédain, et cela lui donna la volonté de se prouver à lui-même, ainsi qu’a elle qu’il n’était pas faible. Il saisit fermement le Premier Draich et le fit tournoyer en formant le chiffre huit.

« Oui, ma reine, » grogna-t-il. « Laissez-moi vous mettre des vêtements et vous donner une arme et nous reprendrons notre cité. »


Source

  • LYON Graeme, Bride of Khaine, Série Warhammer : The End Times Short Story, Black Library, 2015 (traduction par Guilhem3004)